Retraites : il signe des chèques de 22 centimes à quatre élus socialistes29/12/20152015Presse/medias/articlepresse/images/2015/12/AM_0.jpg.420x236_q85_box-3%2C0%2C613%2C343_crop_detail.jpg

Article de presse

Le Progrès

Retraites : il signe des chèques de 22 centimes à quatre élus socialistes

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André Moulin : « J’ai supposé que les députés et sénateurs socialistes de la Loire s’étaient eux aussi, comme les retraités, serrés la ceinture pour donner l’exemple… ». Photo Claude ESSERTEL

Un retraité saint-chamonais a envoyé aux parlementaires socialistes de la Loire des chèques de 22 centimes d’euro. Quatre au total. Ce qui correspond à l’augmentation - gracieusement - accordée, chaque mois, sur sa pension de retraite. Soit 88 centimes !

 « Je ne m’en étais même pas rendu compte. C’est en discutant dans la rue avec un collègue que j’ai appris que ma retraite avait été augmentée en octobre. » André Moulin fonce chez lui, fait ses calculs. Et manque d’être pris de vertige à la lecture des chiffres. « J’ai eu, effectivement, une hausse de ma retraite : elle est de… 88 centimes d’euro, correspondant aux 0,1 % d’augmentation ! ».

« Je voulais faire passer le message de façon humoristique. Même s’il n’y a pas de quoi rire. »

L’homme est connu, à Saint-Chamond et dans la Loire, comme un militant Lutte ouvrière de la première heure. Mais il est également retraité de la métallurgie. Et c’est à ce titre qu’il vient d’entamer un nouveau combat. « Ma retraite a été bloquée jusqu’en octobre 2015 par le gouvernement socialiste. Les retraités comme moi ont vu leurs retraites gelées, puisque je fais partie des « privilégiés » dont la pension (régime général et complémentaire) dépasse 1 200 € par mois. Après 42 ans de travail dans l’industrie… ».

André Moulin a donc choisi de cibler les quatre parlementaires socialistes de la Loire. « J’ai supposé qu’ils s’étaient eux aussi serrés la ceinture pour donner l’exemple, et qu’ils devaient donc avoir des difficultés pour boucler leurs fins de mois. » Le cœur sur la main, le généreux retraité décide donc de reverser aux élus un mois d’augmentation de sa retraite. Soit 22 centimes, que chaque député et sénateur concerné a reçu par chèque mi-novembre.

Un mois plus tard, re-colère. Cette fois, c’est l’annonce sur le Smic qui hérisse André Moulin. « Pas de coup de pouce, avec une hausse d’à peine six centimes de l’heure au 1er janvier. À n’en pas douter, le message des régionales a été entendu par le gouvernement socialiste : il ne faut pas faire de peine aux pauvres… patrons ! ».

L’homme essaie d’en sourire. Un peu jaune. « Je sais que ça ne sert à rien. Mais je voulais faire passer le message, de façon humoristique. Même s’il n’y a pas de quoi rire. Beaucoup de retraités, dans notre pays, sont dans des situations intenables… ».

Au fait, les chèques envoyés aux élus ont-ils été retirés ? « Pas à ma connaissance. Mais je leur avais demandé de ne pas le faire tout de suite. Car j’ai dû payer récemment mon impôt sur le revenu, ma taxe d’habitation, l’assurance de ma voiture, mon loyer, le gaz, l’électricité… ».

Réactions :

Jean-Claude Frécon, sénateur PS

« Je ne lui ferai pas dépenser les 22 cts car je n’encaisserai pas le chèque. Je comprends qu’André Moulin regrette que la hausse ne soit pas plus importante. Ce n’est pas agréable pour ceux qui ont peu. L’effort pour réduire la dette est demandé à tout le monde. Certains ont même vu une baisse de leur retraite. N’oublions pas aussi qu’André Moulin est engagé politiquement à Lutte ouvrière et qu’il a été candidat aux régionales. Cela, il ne le dit pas dans son courrier qu’il a adressé aux parlementaires. »

Maurice Vincent, sénateur PS

« Je n’ai pas eu connaissance de ce courrier. Mais Il faudrait d’abord s’interroger sur le mode de fonctionnement très particulier de Lutte ouvrière. Ils disent qu’ils défendent les travailleurs, en fait ils les font perdre. Ils ne sont pas crédibles. C’est un mouvement inquiétant dans le système politique français. Ceci dit je comprends qu’on ne soit pas content d’une si faible augmentation. Je sais que l’effort demandé aux Français pour maîtriser la dette est difficile. Mais l’objectif est de sauver le système des retraites par répartition. »

Jean-Louis Gagnaire, député PS

« M. Moulin a fait un coup de com, mais je n’encaisserai pas son chèque. Je reconnais qu’une augmentation de ce montant est insultante. Encore faudrait-il savoir s’il est imposable ou pas. Mais l’équilibre du système des retraites est fragile. Il faut aller voir ce qui s’est passé en Espagne où les retraites ont baissé de 30 %, c’est l’austérité. En France, nous sommes dans la rigueur. De toute façon, nous n’échapperons pas à une grande réforme des retraites. Elle pourrait se faire dans l’union nationale avec ceux qui veulent réformer. »

Régis Juanico, député PS

« Je n’ai pas reçu ce courrier évoqué, donc il m’est difficile d’en parler. Mais André Moulin n’est pas un retraité lambda, comme ceux que nous recevons à notre permanence et auxquels nous répondons systématiquement lorsqu’ils nous saisissent pour une difficulté. Bien connu, Monsieur Moulin veut faire parler de lui, via une opération politique. »

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