Aérospatiale - Matra : Trente années de discrimination antisyndicale devant le tribunal03/12/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/12/une-1638.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Aérospatiale - Matra : Trente années de discrimination antisyndicale devant le tribunal

À l'Aérospatiale, la CGT vient de saisir le tribunal des prud'hommes en référé pour discrimination antisyndicale à son égard. Elle a constitué, ou est en train de le faire, 350 dossiers pour le moment, au sujet de chaque militant ou simple syndiqué lésé : 30 à Toulouse, 60 à Saint-Nazaire, 13 à Suresnes, 20 à Châtillon, etc. Sept de ces dossiers sont déjà devant le tribunal, les autres devraient suivre rapidement.

La direction générale fait tous les efforts possibles pour faire de l'obstruction. Elle ne voudrait pas que l'opinion publique ait d'elle une image autre que celle de la société réalisatrice d'Ariane et d'Airbus. Dernière en date de ces manoeuvres : le 24 novembre, l'avocate de la direction, à propos de l'un des dossiers, où il était question du siège officiel d'Aérospatiale boulevard de Montmorency à Paris, a mis en doute la validité dudit siège car personne n'y travaillerait vraiment ! L'audience a donc été reportée... C'est absurde et mesquin, mais cela fait gagner du temps.

Selon la CGT, la politique répressive remonterait à 1967-68 lorsque Maurice Papon était PDG de Sud-Aviation (devenue depuis 1970 Aérospatiale). Déjà le passage d'un ouvrier à la filière technicien, ou d'un technicien à cadre est toujours difficile, mais pour un militant CGT c'est tout simplement impossible, quelles que soient ses qualités professionnelles et ses diplômes.

Les militants et sympathisants du syndicat ont été et sont victimes de brimades, mis en quarantaine. On conseille aux stagiaires et nouveaux embauchés de ne pas les fréquenter.

Et bien entendu la direction les attaque en ce qui concerne les salaires : ils n'ont quasiment jamais d'augmentation ni de promotion. Un simple soupçon d'appartenance à la CGT, ou de sympathie, suffit parfois.

Une déléguée embauchée en 1961, et qui arrive bientôt à la retraite, a expliqué n'avoir jamais reçu la moindre promotion ni augmentation depuis la fin des années 60. Quand elle et son mari, qui se trouve dans une situation similaire, ont calculé leur manque à gagner, ils n'en croyaient pas leurs yeux : en comparant avec les déroulements de carrière des collègues autour d'eux ils chiffraient de 1,5 million à plus de 3 millions de francs (d'aujourd'hui bien sûr) ce que la direction leur avait volé en trente ans !

Un autre militant notait qu'après son embauche il a grimpé, et que sa progression " s'arrête net à la date où je deviens militant ".

Pour le moment les prud'hommes n'ont pas tranché, et les affaires sont reportées...

Mais il n'y a pas que la répression antisyndicale : ainsi à l'usine de Vélizy les employés ont découvert un disque dur informatique sur lequel le personnel était fiché. Il était indiqué jusqu'à l'état de santé des conjoints !

Si les militants syndicaux sont ainsi brimés, et l'Aérospatiale est très loin d'être un cas isolé, c'est pour pouvoir mieux obtenir la soumission du personnel, car pour les patrons " modernes " de l'Aérospatiale, les bonnes vieilles recettes ont toujours cours : division du personnel, lutte antisyndicale, etc.

Pour les patrons - même dans le secteur nationalisé - le droit de penser, de s'exprimer, de se syndiquer, s'arrête aux portes de l'entreprise. Et cela ne concerne pas que le passé : ça dure toujours.

Partager