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- Lutte ouvrière n°1716
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Dans les entreprises
Bata - Moussey (Moselle) : Un succès qui prépare la défense des emplois
"Je n'ai pas de plan social dans mon tiroir, et si on me demandait d'en faire un, je partirais", voilà ce qu'avait déclaré M. Longford, le PDG de l'usine Bata de Moussey (Moselle), il y'a deux mois. C'est dire que sa démission, mi-mai, a ravivé l'inquiétude sur l'avenir dans cette usine du lunévillois où, il y a 4 ans, la direction avait déjà licencié 300 travailleurs.
À côté de l'inquiétude pour l'emploi, il règne un mécontentement profond sur les salaires, qui sont au niveau du Smic, même après 30 ans d'ancienneté. Et depuis le début de l'année les négociations salariales n'ont toujours pas abouti, la direction les reportant de mois en mois sans même se donner la peine de se justifier.
Le 22 mai - journée d'action de la CGT contre les licenciements - se déroulait une nouvelle séance de négociation. Les deux syndicats CGT et CFDT appelaient à un débrayage, suivi par l'écrasante majorité des 875 travailleurs de l'entreprise. Ne recevant aucune réponse de la direction ni sur les salaires ni sur l'emploi, le débrayage s'est transformé en grève avec blocage des portes de l'usine, une cinquantaine de volontaires faisant le piquet pendant toute la nuit pour empêcher l'entrée et la sortie des camions. Cafés et brioches apportés par les autres grévistes ont été nombreux et bienvenus pour tenir la nuit et les sacs de couchage n'ont pas été de trop pour dormir dehors, à la fraîche, dans la cour de l'usine.
Le lendemain matin, dès 7 heures à l'arrivée des bus, plus de 300 personnes étaient rassemblées devant les locaux administratifs. A l'issue de la réunion avec la direction, les syndicats annonçait qu'elle lâchait 3 % d'augmentation sur tous les salaires (à peu près ce que revendiquait la CFDT, la CGT mettant, elle, en avant 500 F d'augmentation) ainsi que le paiement de la journée et demie de grève à condition que les grévistes reprennent le travail. La direction acceptait même que les occupants de la nuit rentrent chez eux et aient leur journée payée.
Cela a été accueilli par des applaudissements et ressenti comme une victoire. À l'appel des syndicats, la reprise du travail a été décidée. Ce succès - les salaires sont bloqués depuis des années - a renforcé le moral des travailleurs. Il n'y avait pas eu de grève de ce type depuis... 1974.
Quant à la question de l'emploi, la direction n'a rien voulu dire tant que le nouveau PDG n'est pas nommé. Rien n'est donc garanti, mais il est clair qu'il se prépare un mauvais coup sous prétexte de pertes qui seraient, paraît-il, plus importantes que prévues.
Mais chacun sait que malgré les pertes annoncées, Bata est un des premiers trusts mondiaux de la chaussure, qui possède des usines aux quatre coins de la planète, et une fortune considérable accumulée sur l'exploitation éhontée des ouvriers du monde entier. C'est là-dessus qu'il faudra imposer à Bata de prendre pour maintenir nos emplois. Et le succès obtenu sur les salaires est un encouragement à ne pas se laisser faire.