- Accueil
- Lutte ouvrière n°1724
- Environnement : Les accords de Kyoto sont "sauvés"... mais pas la planète !
Dans le monde
Environnement : Les accords de Kyoto sont "sauvés"... mais pas la planète !
Le hasard des calendriers des réunions diplomatiques a fait que les mesures de lutte contre le réchauffement climatique ont été discutées à la fois à Gênes au sommet du G8 et à Bonn. A Bonn, les représentants de 176 pays tentaient de définir les modalités d'application d'un accord destiné à lutter contre le réchauffement de la planète et adopté à Kyoto... en 1997 ! C'était la 6e tentative...
A Gênes, tout comme à Bonn, les chefs d'Etat des grandes puissances se sont quittés sur un constat de désaccord opposant les Etats-Unis aux autres pays sur la question de la ratification de ce protocole de Kyoto, censé engager les pays industrialisés à réduire de 5 % en moyenne d'ici 2010 les émissions de gaz dits "à effet de serre", qui pourraient être responsables du réchauffement climatique. Il y a donc, d'un côté, Bush qui refuse de ratifier ce protocole et, de l'autre, ceux qui s'en disent partisans, présentés comme davantage soucieux de préserver l'environnement.
Dans cette mise en scène, la palme du meilleur bonimenteur revient sans conteste à Chirac qui a expliqué qu'il avait insisté pour que le communiqué final mentionne explicitement le désaccord l'opposant aux Etats-Unis. A défaut de préserver l'atmosphère, cela avait le mérite de préserver l'image d'écologiste qu'il essaye de se forger depuis quelque temps.
Quant à Bush, il a déclaré refuser de souscrire à une régulation du rejet des gaz à effet de serre en expliquant, sans rire, que cela mettrait "en danger l'économie américaine" ! En réalité, Bush ne veut surtout pas imposer la moindre contrainte aux industriels américains et notamment aux compagnies pétrolières qui, comme tous les capitalistes des autres pays d'ailleurs, se moquent éperdument de l'avenir de la planète et de la santé de milliards d'êtres humains.
Cette attitude de la première puissance économique, responsable à elle seule du tiers de la production mondiale de ces gaz polluants, a évidemment de quoi choquer. D'autant que Bush propose en fait que le principal effort soit réalisé par les pays pauvres, encouragés à utiliser des énergies renouvelables !
Mais les défenseurs du protocole de Kyoto ne sont pas pour autant les champions de la préservation de l'environnement que l'on a bien voulu nous présenter car ni Kyoto, ni le dernier accord ne règle quoi que ce soit.
A la suite de ce qui avait été envisagé, il ne fait que définir des quotas d'émission de gaz à effet de serre, sans qu'aucune pénalité ne puisse sanctionner ceux qui les dépasseraient. Le Japon n'aurait accepté de signer l'accord qu'à cette condition, ce qui en dit long sur la façon dont il se sent tenu à respecter son quota...
Mais, de toute façon, l'accord prévoit de multiples moyens de dépasser ces quotas. Vu que les forêts et les productions agricoles captent du carbone, certains pays se verraient reconnaître une diminution de leurs quotas... en fonction de leurs surfaces boisées ! Au final, d'après les calculs d'une organisation écologiste, le World Wild Found, les pays industrialisés ne seraient plus contraints qu'à une diminution de 1,8 % au lieu des 5 % initialement prévus.
Et puis, il y a toujours ce "marché de la pollution" qui permettra aux pays riches de racheter des "permis d'émission" de gaz polluant aux pays pauvres qui ne pourraient pas atteindre leurs quotas. Mieux encore, les pays industrialisés pourraient aussi acquérir de tels "permis" en aidant des pays pauvres à s'équiper de technologies jugées "peu polluantes". Un nouveau marché en perspective pour des industriels des pays riches !
Sur le fond, dans ce qui a été décidé, rien n'est de nature à nuire aux intérêts et aux profits des industriels pollueurs. Au contraire, ceux-ci pourraient même y trouver une source de profits supplémentaires !