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Citroën (Saint-Ouen - 93) : Discrimination syndicale condamnée
Il y a quatre ans, à la suite des syndicalistes CGT de Peugeot Sochaux qui avaient fait condamner le patron pour discrimination syndicale aux Prud'hommes et en cour d'appel, la CGT de Citroën Saint-Ouen avait attaqué la direction devant les Prud'hommes pour le même motif. Il y avait 15 demandeurs : dix délégués présents dans l'usine et cinq anciens délégués partis en retraite, en préretraite ou licenciés.
Pour éviter une nouvelle condamnation, la direction cédait pour les " actifs " des réajustements de salaire allant de 500 F à 1300 F par mois et le paiement d'indemnités pour les années antérieures allant de 50 000 F à 120 000 F. Mais elle refusait de céder quoi que ce soit pour les " retraités ". Les actifs avaient donc décidé d'accepter les " transactions " en reversant 10 % de leurs indemnités aux retraités en " acompte " sur les condamnations à venir. L'action s'est poursuivie aux Prud'hommes. C'est la cour d'appel qui a condamné Citroën à payer aux retraités CGT des dommages-intérêts allant de 40 000 F à 120 000 F à chacun des cinq.
Il faut dire que la discrimination n'était pas difficile à prouver : ainsi, un délégué est parti en 1994 au coefficient qu'il avait obtenu... en 1964 : 30 ans sans promotion ! Il avait eu le tort de s'engager à la CGT en 1968. Il avait une moyenne de 900 F de moins que ses collègues de travail.
Un autre, passé chef d'équipe en 1967, gréviste et délégué en 1968, est parti en 1994 au coefficient... de 1967, et n'a jamais pu retrouver un poste de chef d'équipe : 2500 F par mois de moins que la moyenne des chefs d'équipe. Et pour les autres c'était de la même eau. Deux camarades sont partis après vingt ans de travail aux postes les plus durs au coefficient minimum. Un autre avait obtenu de la promotion... deux mois avant son départ.
Tout cela n'a pas empêché Citroën de se pourvoir en cassation contre cette décision. Mal lui en a pris. Cette cour vient de confirmer la condamnation, nouvelle décision de justice qui a l'avantage de faire jurisprudence.
Au-delà de la réparation financière qui reste limitée, c'est bien sûr une victoire morale pour tous ces camarades et pour les salariés de l'usine. Et s'il faut reconnaître à Citroën un domaine où il n'a pas fait de discrimination, c'est entre les militants et sympathisants du Parti Communiste et de Lutte Ouvrière. Ils ont été traités à la même enseigne !
Il y a 40 ans, les militants CGT risquaient de se faire embarquer par la police à chaque distribution de tracts. Et, depuis 10 ans, la collecte pour financer le bulletin Lutte Ouvrière se fait avec une bannière pour cacher les caméras de l'usine. En effet les donneurs, enregistrés sur magnétoscope, étaient ensuite prévenus par leur chef qu'ils n'auraient pas d'augmentation !
Citroën a changé sous la pression, mais pas complètement. Après 30 ans ou 40 ans de travail, pour les militants CGT qui partent de l'usine, ce n'est jamais une blouse qu'ils laissent dans leur vestiaire, mais toujours un bleu de travail !
Mais tout cela n'a fait que renforcer la solidarité et la cohésion entre les militants, quelle que soit d'ailleurs leur génération. Et les anciens sont fiers de voir que les structures syndicales qu'ils ont mises en place, quand c'était le plus dur, continuent à servir au même combat contre la rapacité du patron.