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Leur société
Insécurité routière : Le gouvernement met de l'eau dans son vin
La semaine dernière, un conseil interministériel a rendu publiques les mesures visant à renforcer la sécurité routière. Il y a indiscutablement un durcissement concernant les infractions les plus graves (conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à 0,5, excès de vitesse) ou les plus courantes (non port de la ceinture, téléphone au volant). Les peines pour les chauffards meurtriers sont aggravées pouvant atteindre dix ans de réclusion, les contrôles de vitesse sur autoroutes seront renforcés soit par des radars automatiques plus performants, soit par le contrôle des tickets de péage.
Les médias ont présenté cet arsenal répressif comme la guerre désormais déclarée aux chauffards, ces " barbares des temps nouveaux ", comme la fin du " pas vu, pas pris " selon la formule du Premier ministre Raffarin. Des mesures d'accompagnement préventif sont aussi envisagées comme le permis probatoire pour les nouveaux conducteurs (permis définitif au bout de trois ans de conduite) ou un suivi médical pour les automobilistes de plus de 75 ans. Bien des problèmes restent cependant en suspend et la campagne menée par le gouvernement épargne volontairement la politique passée et actuelle de l'État dans la situation présente.
La France est un des pays d'Europe les plus " accidentogènes " comme disent les spécialistes. En 2001 ce sont 7720 personnes qui sont mortes sur les routes dont 2077 âgées de 15 à 24 ans et 153 945 ont été blessées, dont beaucoup de manière irrémédiable. Le nombre de morts sur les routes en 2000 est de 136 par million d'habitants en France pour 66 en Suède et 60 au Royaume Uni. Cette hécatombe impose en effet des mesures draconiennes. Pourtant, si la volonté de réprimer les chauffards est bien présente dans le dispositif du gouvernement, elle est beaucoup plus timide et même totalement absente dès lors que des intérêts économiques sont en jeu.
Ainsi, concernant la limitation de vitesse, à aucun moment le ministre des Transports, Gilles de Robien, ne prévoit l'obligation de brider les moteurs. Pourtant ce serait une mesure simple, efficace et économique puisqu'elle limiterait considérablement les contrôles. Il faut croire que, face aux lobbies des constructeurs automobiles, la volonté de Robien s'émousse.
De la même manière le taux d'alcoolémie à 0,5 a été maintenu alors que, de l'avis même de Mattei, ministre de la Santé, il aurait fallu imposer le taux zéro. S'en est suivie toute une polémique sur " le taux zéro " qui n'existerait pas puisqu'il existe une fermentation naturelle du corps humain. Quoi qu'il en soit, derrière ce pseudo-débat, se cache en réalité la volonté gouvernementale de ne pas léser les intérêts économiques de toute la filière viticole.
Par ailleurs, le gouvernement n'évoque à aucun moment des mesures d'amélioration des infrastructures routières. Pourtant il existe encore beaucoup de points considérés comme dangereux où les pouvoirs publics se contentent d'installer des leurres de gendarmes ou même laissent purement et simplement les choses en place en attendant le énième accident pour enfin intervenir.
Enfin il y aurait un autre moyen de limiter la mortalité sur les routes, ce serait tout simplement d'améliorer et d'étendre le réseau des transports en commun, ce qui limiterait le nombre de déplacements en voiture individuelle. Mais surtout, il faudrait réduire considérablement la circulation des poids lourds en augmentant très nettement les transports par rail, par ferroutage ou voies navigables.
Ces voies-là sont bien peu " explorées " par le gouvernement qui n'entend pas s'attaquer aux intérêts économiques des lobbies concernés par la sécurité routière.