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Leur société
Le cirque parlementaire
"La France, dans son chemin du paradis, est encore au purgatoire puisqu'il reste des socialistes". Et vlan! Une nouvelle pierre dans le jardin des socialistes a été envoyée de Strasbourg par Raffarin, le 1er juillet, lors d'un rassemblement des représentants de la droite européenne. Du coup, à Paris, les députés socialistes en train de se prononcer sur le projet de loi Fillon sur les retraites décidaient de sortir de l'hémicycle et le président du groupe socialiste offusqué de "cette conception inacceptable et insupportable de la démocratie" exigeait que Chirac désavoue publiquement son Premier ministre. Alors Raffarin s'excusait, jurait ses grands dieux qu'il s'agissait là d'un trait d'humour ne correspondant ni à ce qu'il voulait dire ni à ce qu'il pense.
Décidément, à l'Assemblée, il n'y a pas d'intermittence du spectacle. Ainsi, quelques jours plus tôt, le ministre de la Fonction publique, Delevoye, déclarait au contraire au Parisien-Dimanche qu'il se félicitait de la motion de censure déposée par le PS dans le débat parlementaire sur la loi Fillon car elle permettrait "probablement d'aider le PS à tenter enfin d'exister" et même qu'il se sentait "orphelin d'une pensée socialiste".
En fait, quelles que soient les sorties plus ou moins contrôlées de Raffarin, la droite sait fort bien à quoi s'en tenir sur l'opposition du PS et même sur celle du PC qui dépose à l'Assemblée une kyrielle d'amendements. Elle ne craint pas ce petit jeu parlementaire qui lui permet même de se mettre en valeur en montrant combien elle respecte le "jeu démocratique".
D'ailleurs, quand le PS dépose une motion de censure contre le gouvernement, quand son premier secrétaire se revendique d'une opposition "frontale" à sa politique, chacun sait très bien qu'ils gomment le fond de leur pensée exprimée en toute clarté il y a peu de temps par Rocard et d'autres, quand ils affirmaient qu'il valait mieux que ce soit la droite qui porte les mauvais coups contre les retraites pour éviter à la gauche d'avoir à le faire au cas où elle reviendrait au pouvoir.
Les véritables craintes ne sont pas là, comme en a témoigné le même Delevoye en déclarant au cours de la même interview: "Il faut que se reconstitue très vite un pôle de gauche, sinon ce sont les plus extrémistes qui dominent la scène publique".
Ceux que ce monsieur qualifie d'"extrémistes" sont ces grévistes, notamment de l'Éducation nationale, qui ne voulaient pas d'une décentralisation qui se serait faite sur leur dos et sur celui des élèves du public. Ce sont les grévistes refusant le plan Fillon qui se sont organisés eux-mêmes et qui n'étaient pas toujours d'accord avec les directions syndicales. Ou encore les manifestants dont les pancartes, les banderoles et les slogans associaient parfois dans un même rejet les projets actuels de la droite et ceux que la gauche plurielle avait sous le coude pour le cas où elle aurait gagné la Présidentielle de l'an passé.
C'est bien cela, et pas le PS, qui a de quoi inquiéter à droite ceux qui nous gouvernent, tout comme la gauche parlementaire, qui nous gouvernait encore très récemment.