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Grande-Bretagne : Des rails du métro cassent sous le poids du profit!
En moins d'une semaine deux accidents graves ont touché le métro londonien, les 17 et 19 octobre. Dans un cas comme dans l'autre, ce serait un rail brisé qui aurait entraîné le déraillement d'une rame. Fort heureusement, ces accidents n'ont pas fait de victime. Mais, outre la fermeture temporaire des lignes concernées qui en résulte, ils sont venus souligner les conséquences de la privatisation partielle du métro londonien accomplie par Blair.
Cela fait en effet un peu plus de six mois que cette privatisation partielle a été achevée, après plus de trois ans de «restructuration», c'est-à-dire pour l'essentiel de suppressions d'emplois dans les secteurs de maintenance du métro. Finalement, en avril dernier, le métro a été divisé en trois. D'un côté «Transport for London» (TfL), entreprise publique contrôlée par la mairie du Grand-Londres, est responsable des horaires, de la perception des titres de transport et de l'acheminement des passagers. De l'autre, deux consortiums privés -Tube Lines et Metronet- sont responsables chacun de la maintenance et de la rénovation d'une moitié du réseau, aussi bien en ce qui concerne les rames que les voies et les stations, et ceci pour une durée de trente ans.
Bien entendu, l'État continue à verser des subventions au métro, mais uniquement à ces deux consortiums privés, sous couvert de participation à sa rénovation. En revanche TfL doit se contenter des revenus passagers tout en ayant à payer aux deux consortiums des redevances aussi bien pour l'usage de l'infrastructure et des rames que pour leurs travaux de maintenance. De sorte que des augmentations de tarif allant de 8 à 20% ont d'ores et déjà été annoncées pour l'an prochain, et ceci alors que l'équivalent d'un coupon mensuel trois zones coûte déjà environ 170 euros!
En janvier dernier, un accident sur la Central Line, l'une des plus importantes lignes de la capitale, avait donné un avant-goût de ce que serait la privatisation alors qu'on n'en était encore qu'au stade de sa préparation. Un déraillement avait révélé un grave défaut sur 85 rames opérant sur cette ligne, défaut qui était connu mais contre lequel aucune mesure n'avait été prise faute de personnel de maintenance. Et à la suite de ce scandale, la Central Line avait été fermée pendant quatre mois plutôt que d'embaucher le personnel nécessaire!
Or les entreprises choisies par Blair pour former les consortiums privés du métro ont déjà une sinistre réputation dans les services publics privatisés. On y trouve par exemple Adtranz, filiale commune du canadien Bombardier et de Daimler-Chrysler, qui a construit les fameuses rames défectueuses de la Central Line. On y trouve également Jarvis et Balfour Beatty, qui, pendant longtemps, se sont partagé l'essentiel des contrats d'entretien des chemins de fer privatisés, en particulier là où des accidents graves ont entraîné la mort de passagers suite à des défauts de maintenance. Elles sont d'ailleurs toutes les deux l'objet d'enquêtes criminelles à ce sujet, à telle enseigne que Jarvis vient juste de renoncer à ses contrats d'entretien ferroviaires, estimant que les risques associés en étaient trop élevés. Parmi bien d'autres entreprises dont les prouesses ne valent pas mieux, on trouve aussi EDF, dont la filiale britannique London Electricity s'est trouvée au centre d'un scandale de vente forcée aux dépens des usagers.
Qui peut s'étonner que ces vautours avérés profitent de la situation, maintenant que Blair a mis le métro dans leurs serres? Dans le cas de l'accident du 19 octobre, Metronet, le consortium responsable de la maintenance dans ce secteur, a reconnu que la dernière inspection des rails par ultra-sons (qui permettent de détecter des failles invisibles à l'oeil nu) remontait... au mois de mai, alors que dans les années 1990 ces inspections étaient mensuelles, voire hebdomadaires sur certaines portions du réseau. Quant aux inspections visuelles qui étaient quotidiennes jusqu'en 1999, elles ont été faites tous les trois jours durant la période de «réorganisation» et leur fréquence a encore diminué depuis la privatisation, faute de personnel bien sûr.
Dans sa servilité envers le capital, Blair a pourtant conçu les contrats de «partenariat» entre l'État et les consortiums privés du métro pour leur garantir un profit net minimum annuel équivalant à 6% de leurs capitaux engagés. Mais il n'a jamais été question de mettre le moindre obstacle à leur avidité et rien ne les empêche de chercher à faire plus, même si c'est avec la peau des usagers.