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Leur société
Tarallo libéré : Enfin une justice humaine
André Tarallo, l'une des trois figures principales de l'affaire Elf, condamné à quatre ans de prison en novembre dernier, vient d'être libéré pour raisons médicales, moins de deux mois après son incarcération. Son état nécessiterait une opération délicate de la carotide, qui «ne peut être effectuée en milieu carcéral». Vrai? Faux? En tout cas c'est la première fois qu'on en entend parler.
Tarallo, qui était sur les bancs de l'ENA avec Jacques Chirac, a fait pratiquement toute sa carrière dans la compagnie pétrolière Elf. Il appartenait à l'équipe dirigeante, à la fin des années 1980, et était spécialement chargé des relations avec les chefs d'États africains. Il négociait avec eux ces contrats juteux qui permettaient à Elf, pour des tarifs défiant toute concurrence, et en échange de quelques retombées sonnantes pour les chefs d'États et leurs proches, de piller le sous-sol africain et, accessoirement, de détruire l'environnement et de déplacer les populations gênantes. Il avait mis au point ce système de détournement appelé «abonnement», qui consistait à prélever trois francs par baril sur toute la production de pétrole, soit au total des centaines de millions de francs par an, redistribués ensuite aux «abonnés»: chefs d'États, ministres, dirigeants de sociétés et amis divers.
La justice l'a accusé d'avoir utilisé ce système pour son enrichissement personnel, à hauteur de 45 millions d'euros, qui auraient atterri sur ses comptes en Suisse, et auraient payé une somptueuse propriété en Corse, villa gigantesque estimée à 23 millions d'euros.
Dans sa défense, Tarallo a prétendu qu'il agissait pour le compte du président gabonais, Omar Bongo. Vu les sommes en jeu, on peut imaginer que l'un n'a pas empêché l'autre et qu'il y en avait pour tout le monde. Ce qui semble sûr, c'est que la villa est bien à lui...
Si Tarallo fut condamné à quatre ans de prison et à deux millions d'euros d'amende, et fut arrêté à l'audience, à ce jour, il n'a payé que 1,5 million d'euros de caution (sur quel compte?), n'a séjourné que deux mois dans les geôles de la République. Qui osera prétendre que ce gouvernement se désintéresse de toutes les personnes âgées?
Nous n'avons pas les moyens de juger de la véracité des raisons médicales invoquées. L'intérêt de garder en prison ce personnage n'est pas évident. Mais on constate que la mansuétude de la justice pour ces hommes si proches du pouvoir économique et des dirigeants politiques n'a pas fait défaut.
Tandis que bien des détenus en mauvaise santé, souvent aussi âgés et dont l'état nécessiterait des soins, ne bénéficient pas de la même attention.