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Kosovo : L’intervention impérialiste n’a rien réglé
La situation critique du Kosovo est redevenue explosive mercredi 17 mars. Cette province, qui faisait partie de l'ex-Yougoslavie, puis de la Serbie après l'éclatement de celle-ci, a été placée sous l'autorité des Nations unies en 1999. Des affrontements très violents ont à nouveau opposé la majorité albanaise à la minorité serbe, causant la mort de 28 personnes, faisant 600 blessés et 3 600 sans-abri.
Au début, une dizaine de villes, dont la capitale Pristina, Mitrovica dans le nord, et Urosevac dans le sud, ont été touchées. Les forces de l'ONU ont dû évacuer plus d'un millier de Serbes vers des localités plus sûres.
Parallèlement, dans la Serbie voisine, il y a eu de violentes manifestations antialbanaises en solidarité avec les Serbes du Kosovo. Tandis que les Albanais du Kosovo s'en prenaient aux maisons des Serbes mais aussi aux églises (16 d'entre elles ont été brûlées), des manifestants serbes menaçaient les mosquées en Serbie.
Environ 200000 Serbes avaient quitté le Kosovo en 1999 après le retrait des troupes serbes. Depuis, des centaines de Serbes et de non-Albanais ont été tués ou ont disparu. Les quelque 80000 Serbes qui restent encore au Kosovo, qui compte près de deux millions d'Albanais, sont confinés dans des enclaves sous protection de la Kfor (les soldats de l'ONU).
Les Nations unies, qui assument l'essentiel du pouvoir au Kosovo depuis 1999, se sont contentées une nouvelle fois de renforcer leur dispositif militaire. L'OTAN a décidé d'envoyer 2000 hommes supplémentaires, parmi lesquels des soldats américains, français et britanniques, pour renforcer les quelque 18500 soldats déjà présents.
Les représentants des grandes puissances ainsi que le président russe Poutine ont dénoncé un «nettoyage ethnique» et invité les dirigeants albanais du Kosovo à ramener le calme. Le Premier ministre kosovar Bajram Rexhepi a promis de reconstruire les logements serbes et les églises détruits.
Ces violents affrontements rappellent que, malgré les belles promesses des principales grandes puissances qui interviennent au Kosovo sous le drapeau de l'ONU, la situation reste dramatique.
En 1999, les grandes puissances prétendaient restaurer la cohabitation inter-ethnique dans cette petite province. En réalité, rien n'a été réglé, car il ne suffit pas de déployer la force armée et de mettre la province sous tutelle, en faisant régler par un représentant de l'ONU les affaires courantes, pour qu'une région retrouve la sérénité. Au contraire même, puisque l'occupation étrangère exacerbe le sentiment national des populations des régions occupées.
Il est bien vaguement question de fixer un statut définitif à ce pays. Cela devait faire l'objet de discussions en 2004 ou 2005. Mais quand bien même les grandes puissances se mettraient d'accord sur un statut autonome du Kosovo, comme on l'évoque à nouveau ces jours-ci, cela ne résoudrait rien, car un statut ne donnera pas les moyens économiques nécessaires pour sortir cette région du sous-développement.
Aux dires mêmes de Bernard Kouchner, lorsque celui-ci présidait la mission des Nations unies au Kosovo, les fonds de fonctionnement de celles-ci n'arrivaient pas. C'est dire que les «promesses solennelles» d'aides financières à la reconstruction du Kosovo par les grandes puissances, censées réparer les destructions qu'elles avaient elles-mêmes causées pour l'essentiel par leurs bombardements, se sont enlisées dans les sables des promesses non tenues et des aides jamais versées.
Faute des moyens qui permettraient de sortir toute la région, le Kosovo mais aussi les autres régions issues de l'éclatement de la Yougoslavie comme la Bosnie et la Macédoine, de la misère économique, placé sous la tutelle des puissances impérialistes, puisqu'en pratique c'est le général commandant la Kfor qui tient tous les leviers du pouvoir entre ses mains (l'armée mais aussi les finances, les relations entre les minorités, la politique étrangère et une partie des rouages de la justice), le Kosovo reste plongé dans une tension permanente, qui se prolonge indéfiniment et qu'une étincelle suffit à faire exploser, puisque c'est la rumeur d'une agression d'enfants albanais par des enfants serbes qui a déclenché les affrontements de ces derniers jours.
En entretenant dans cette région de l'Europe les différents nationalismes, en les jouant les uns contre les autres, les grandes puissances ont largement contribué à envenimer les relations entre les peuples, en ne leur laissant guère d'autre avenir que de passer d'une tutelle à une autre, sans qu'aucun des problèmes les plus urgents, et d'abord les problèmes sociaux, ne trouve sa solution. C'est ce qui alimente les rivalités inter-ethniques et ferme à tous les peuples de l'ex-Yougoslavie les issues qui leur permettraient d'en sortir, ne laissant à la place que la haine.