Allemagne : Face aux attaques patronales, un début de riposte23/07/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/07/une1877.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Face aux attaques patronales, un début de riposte

Les attaques pour imposer un allongement du temps de travail se poursuivent en Allemagne. Après Siemens, c'est désormais un des plus gros groupes industriels, Daimler-Chrysler, qui est à l'offensive.

Cette dernière a été préparée par une étude, publiée en avril dernier, qui aurait découvert un "surplus" de 10000 postes de travail. Plus récemment le patron a annoncé qu'il voulait obtenir 500 millions d'euros d'économies par an. Tout cela alors que le groupe est largement bénéficiaire puisqu'il a réalisé 6,9 milliards d'euros de bénéfices en 2002; et encore 3,1 milliards en 2003.

Ces économies doivent être réalisées par le biais de plusieurs mesures: allongement du temps de travail de 35 à 40 heures pour 20000 salariés, suppression des cinq minutes de pause par heure de travail obtenues dans certaines usines lors d'une grève en 1973, réduction des primes de nuit et de Noël, embauche de tous les nouveaux salariés sous un nouveau statut aux conditions de rémunération inférieures au tarif actuel. Le Comité central d'entreprise a calculé que, si ces mesures étaient appliquées, un travailleur du Montage toucherait à l'avenir, toutes primes comprises, 1909 euros brut par mois au lieu de 2 669 actuellement.

Si elle n'obtient pas satisfaction, la direction menace de délocaliser la production de l'usine de Sindelfingen, vers celle de Brême et, en partie, en Afrique du Sud, ce qui menacerait 6000 emplois dans l'usine de Sindelfingen située dans la banlieue de Stuttgart. Le choix du site de Sindelfingen n'est certainement pas lié au hasard. Avec environ 35000 salariés, c'est un des bastions du syndicat de la métallurgie, l'IG Metall. Par ailleurs la convention collective de la région de Stuttgart fait traditionnellement référence lors des négociations salariales de la métallurgie et est ensuite, peu ou prou, étendue aux autres régions du pays.

Mais là, contrairement à d'autres entreprises où ce type de recul sur l'allongement du temps de travail a déjà été entériné, les attaques patronales ne sont pas restées sans réponse de la part des travailleurs. Dès le 9 juillet des débrayages ont eu lieu dans différentes usines du groupe. Le 15 juillet, environ 80000 salariés de douze usines allemandes de Daimler-Chrysler (sur 160000) ont participé à une grève d'avertissement pour protester contre les menaces du patron. Dans l'usine de Sindelfingen, des débrayages se sont poursuivis les jours suivants. Et mardi 20 juillet, c'est l'équipe de nuit qui a débrayé à son tour, en fin de poste.

S'il affirme refuser un retour généralisé aux 40 heures, l'IG Metall se dit tout de même disposé à trouver "une solution qui assure l'emploi sur le long terme". C'est-à-dire qu'il est prêt à céder à certaines exigences patronales, tout en cherchant à sauver la face. Il est aussi en discussion à propos d'un avenant à l'accord salarial pour certaines catégories de personnel (cuisine, cantine, imprimerie, nettoyage, gardiennage, etc.) qui ne leur garantirait plus les même avantages qu'aux travailleurs de production. Pour l'instant la seule "concession" de la direction a été d'envisager, à condition que ses propositions soient acceptées, une baisse de la rémunération des cadres dirigeants jusqu'aux agents de maîtrise. Sans même en préciser la portée. Au-delà de cette mesure symbolique -qui ne représenterait au mieux que 0,8% des 500 millions d'économies exigés!- il n'est évidemment pas question de toucher aux profits.

"S'il doivent nous réduire les salaires de 20%, alors nous pouvons tranquillement faire grève plusieurs semaines, même sans subvention syndicale" (en Allemagne les grévistes touchent en général une allocation de la caisse de grève du syndicat), déclarait à la presse un salarié de l'usine. Il est difficile de savoir si cela représente l'opinion de tous les travailleurs. Mais il est certain que le mécontentement est là, ce qu'expriment les grèves d'avertissement suivies très majoritairement.

Nous ne savons pas si l'IG Metall acceptera tout ou partie des exigences patronales, comme il l'a fait dans d'autres cas, ou si, devant l'intransigeance de la direction, il finira par appeler à une véritable grève, comme il menace de le faire à partir du 23 juillet. En tout cas le mouvement actuel chez Daimler-Chrysler permet de mesurer la force qu'aurait la classe ouvrière si elle entrait vraiment en lutte pour faire ravaler au patronat ses prétentions à vouloir baisser le niveau de vie des travailleurs.

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