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Polynésie - Gaston Flosse : Un «parrain» et son parrain
Le renversement de la majorité dans l'Assemblée de Polynésie et l'élection de Gaston Flosse à sa présidence dans des conditions pour le moins laborieuses, pour ne pas dire fabriquées, ont braqué les projecteurs de l'actualité sur l'indéboulonnable notable tahitien.
À 73 ans, Gaston Flosse possède un passé politique aussi bien rempli que son compte en banque et son carnet d'adresses. Depuis quarante ans, il n'a cessé d'occuper des mandats électoraux, sous la bannière gaulliste puis UMP: tour à tour et en même temps maire (six fois), sénateur, député (quatre fois), président de l'Assemblée territoriale de la Polynésie française (cinq fois), député au Parlement européen, et même secrétaire d'État au Pacifique Sud, de 1986 à 1988, dans le gouvernement Chirac.
L'ancien assureur, dont le métier lui avait permis de se lier à tout ce que la Polynésie compte de notables, s'était assuré des amitiés solides. Les liens qu'il entretient avec Chirac ne sont pas un secret et Jacques, l'un de ses neuf enfants, a pour parrain le Jacques qui se trouve à l'Élysée.
Mais l'impressionnante longévité politique de Flosse a d'autres raisons que ses supposés talents d'administrateur. Car même si, à chaque fois qu'il a été inquiété par la justice, l'affaire s'est conclue par un non-lieu, il a tout de même été l'objet d'une impressionnante série de mises en examen portant toutes, d'une manière ou d'une autre, sur ses pratiques clientélistes.
Une instruction, une de plus, est d'ailleurs en cours depuis un an, qui révèle que la présidence polynésienne faisait bénéficier de ses largesses plusieurs dizaines de personnes. Celles-ci auraient touché en moyenne un salaire de 3300 euros... à ne rien faire. De hauts fonctionnaires, d'anciens journalistes, des jardiniers, des piroguiers, des surfeurs, des chanteurs, d'anciennes Miss Tahiti ont ainsi profité de l'aubaine, assurant à Gaston Flosse une base de fidèles.
En fait, depuis des années, non seulement la métropole couvre ses agissements, mais elle les encourage, en accordant toujours davantage «d'autonomie», non à la population polynésienne, mais à ceux qui dirigent, ne comptant pas l'argent octroyé à titre régulier ou exceptionnel à ces institutions. Et, accessoirement, en enterrant toute enquête sur l'usage de ces fonds.
Pour les gouvernements français, cette politique est motivée par des raisons qui vont bien au-delà de l'amitié personnelle entre Chirac et Flosse. Il s'agit de faire pièce aux mouvements indépendantistes, qui risqueraient de lui faire des difficultés dans quelques territoires du Pacifique qui ne lui sont pas inutiles, en Polynésie ou ailleurs. Si les essais nucléaires ont été suspendus en Polynésie, un exemple indépendantiste qui ferait contagion pourrait toucher par exemple la Guyane, d'où est lancée la fusée Ariane.
Alors, pour l'État français, la sauvegarde de ces possessions lointaines n'est pas désintéressée. Et en plus, si on peut rendre service à un vieil ami...