Au Bâtiment M de La Redoute, secteur des expéditions de colis par La Poste, une grève a éclaté le jeudi 9 avril. Les machines doivent être arrêtées trente minutes le midi pour la pause. Mais dans les faits, la machine stoppe cinq minutes avant pour qu'on puisse se laver les mains. Un chef zélé a cru malin de limiter strictement la pause à trente minutes pile. Devant nos protestations, il a voulu nous impressionner en nous demandant s'il fallait nous compter en grève. L'ensemble des salariés a répondu oui. C'est ainsi que le chef a déclenché la grève de 26 travailleurs sur les 30 de l'atelier. Cette grève a correspondu à un ras-le-bol sur nos conditions de travail. Toujours plus de productivité, travail aux machines sans remplaçant pour aller aux toilettes, vexations et brimades des chefs. Ainsi, nos jours de congés étaient refusés, même quand on les posait longtemps à l'avance, sans aucun prétexte. Tous soudés, nous avons fait connaître nos revendications, en allant distribuer des tracts à la porte de l'usine pour toucher les autres secteurs. Il a quand même fallu quatre jours pour obtenir deux embauches, l'arrêt des machines avant la pause du repas et un quart d'heure en fin de poste, l'attribution des journées de congés avec un délai de prévenance de huit jours. Si la direction a reculé, c'est qu'elle craignait que notre exemple ne devienne contagieux, car partout dans La Redoute on commençait à parler de notre grève. Il y a longtemps qu'on n'avait pas fait reculer la direction, même dans un seul secteur, et tout le monde avait un sentiment de victoire.