Où iront donc les 2 milliards de recette attendus par l'institution de la journée travaillée et non payée du lundi de Pentecôte? Aux personnes âgées? Certainement pas en totalité et surtout pas en 2005, 2006 ni même en 2007. Le journal La Tribune a rendu compte de la ventilation des sommes qui devraient être recueillies.

Sur 2 milliards, seul 1,2 milliard serait prévu d'être attribué pour faire face, en théorie et dans l'avenir seulement, aux besoins des personnes âgées. Le reste serait affecté au financement d'une petite partie de ce qui est déjà consacré aux handicapés. Ce qui soulève d'ailleurs la protestation des associations d'handicapés, inquiètes d'un éventuel désengagement de l'État dans ce qui existe aujourd'hui.

Sur ce 1,2 milliard d'euros restant, 400 millions seront pris pour financer une partie de l'APA, l'allocation dépendance déjà existante, dont le gouvernement a décidé en 2003 la baisse de la prise en charge par la collectivité.

Mais le bouquet est que les 800 millions d'euros en 2005 et en 2006 ne seront pas attribués aux personnes âgées afin de leur donner, comme il avait été annoncé, «des moyens supplémentaires». En effet, sur ce total restant, 385 millions d'euros seront mis en réserve en 2005, puis 200 autres millions en 2006. Le secrétaire d'État qui supervise l'opération ne trouve «rien de scandaleux» dans cette opération de détournement financier préventif: «Nous agissons comme le ferait un ménage. Nous avons de l'argent. Au lieu de tout dépenser à mauvais escient, nous le plaçons. Cela nous rapportera d'ailleurs des intérêts. Et après 2007, nous serons bien contents de la trouver, cette réserve».

On croit rêver! L'argent détourné de la poche des travailleurs va servir au gouvernement à faire des placements financiers! Quant à oser dire, dans la situation désastreuse actuelle, que cet argent ne pourrait pas trouver une destination immédiate, il faut vraiment ignorer tout de la réalité. Pratiquement rien n'a été fait depuis la canicule de l'été 2003 et ses milliers de morts, et tout reste à faire. Les témoignages s'accumulaient alors sur l'absence de salles climatisées dans la plupart des maisons de retraite, le manque de personnel qui faisait qu'il n'y avait personne, ne serait-ce que pour donner un verre d'eau aux vieillards, et que rien n'a changé depuis!

Bien des travailleurs enragent face au vol d'un jour férié et face à l'institution d'un jour travaillé non-payé. Derrière les appels «à la solidarité» de Raffarin, ils sentent l'arnaque, de la même eau que celle de la vignette automobile instituée par le socialiste Guy Mollet en 1956, elle aussi «pour les vieux», qui n'en ont jamais vu la couleur. Mais aujourd'hui le gouvernement fait plus fort. D'entrée il annonce qu'une part importante de ce qu'il va récolter ne servira pas à sa prétendue «solidarité» envers les personnes âgées.