France Télécom : Gros appétits capitalistes04/08/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/08/une1931.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

France Télécom : Gros appétits capitalistes

France Télécom vient d'annoncer presque simultanément le rachat d'Amena, troisième opérateur de téléphonie mobile espagnol, pour la somme de 6,4 milliards d'euros, et des résultats «bons, voire très bons» pour le premier semestre 2005. Son bénéfice net aurait grimpé à 3,4 milliards contre les 2,4 prévus.

Ce sont avant tout le mobile et l'Internet (l'ADSL) qui font grimper ces bénéfices, mais France Télécom annonce aussi que dans la branche du téléphone fixe ils ont en même temps cessé de décroître (la hausse du prix de l'abonnement n'y est pas pour rien!). Du coup, le cours de l'action a augmenté de 1,66%...

Ainsi, France Télécom, bien que surendettée depuis plusieurs années, rapporte des profits substantiels à ses actionnaires. Ce sont des capitaux considérables qui sont en jeu dans l'ensemble du secteur des télécommunications, émanant des grandes banques et sociétés d'assurances, des fonds dits d'investissement de compagnies financières y compris anglo-saxonnes.

La frénésie spéculative de ces grands secteurs capitalistes à la fin des années 1990 avait entraîné une frénésie de rachats de sociétés à travers le monde, à tel point que le rachat d'Amena aujourd'hui et ses 6,4 milliards d'euros font pâle figure à côté des... 40 à 50 milliards d'euros qu'avait payé France Télécom pour acquérir Orange (téléphone mobile) en 2000! L'éclatement de la «bulle» étant intervenu là-dessus, on avait crié à la faillite imminente pour France Télécom vu son endettement spectaculaire: celui-ci frôlait les 70 milliards d'euros, un record, en 2002.

Mais l'État avait volé à son secours avec sa garantie et quelques milliards d'euros. Ce qui avait permis du même coup à Thierry Breton, fraîchement promu PDG du groupe, de mettre en place un vaste plan de restructurations, économies, suppressions de postes.

Aujourd'hui, son successeur, Didier Lombard, se sent à nouveau pousser des ailes, même si la dette est encore proche des 50 milliards d'euros. À propos du rachat d'Amena, il a commenté «C'était une occasion qui ne se représenterait pas, nous y sommes allés»... Selon un «spécialiste du secteur» cité par Libération (28/07/05), «France Télécom était très intéressé par le crédit d'impôts de 1,7 milliard d'euros dont il pourra bénéficier en Espagne en rachetant Amena...»

Ce sont en effet des choses qui ne se refusent pas. D'autant que Amena, ce seront quelque 11,7 millions de clients, une position de second sur le marché du mobile espagnol qui est, paraît-il, en expansion. On n'arrête pas la boulimie de profits des capitalistes, même si Didier Lombard dit lui-même que «la bulle est en train de se regonfler». Mais les gros actionnaires piaffent!

Si l'heure semble quelque peu à l'euphorie parmi les dirigeants, les travailleurs de France Télécom savent ce que ces grandes manoeuvres signifient pour eux et pour leurs camarades d'Espagne, de Pologne ou d'ailleurs. La course à la rentabilité, ce sont les recherches permanentes d'économies sur leur dos, les «restructurations» incessantes destinées autant à rendre le personnel plus «flexible» qu'à améliorer l'organisation technique du travail, la surexploitation du personnel précaire dans les centres d'appels, la fonte continuelle des effectifs. C'est au détriment de ses salariés et de ses abonnés (on dit maintenant ses «clients») que France Télécom remplit ses caisses.

En mai encore, sous couvert d'améliorer «la relation client», environ 2 200 nouvelles suppressions d'emplois (évaluation syndicale) ont été envisagées en France. Fin juin, Didier Lombard annonçait: «Nos salariés vont de nouveau devoir s'adapter».

En Pologne, le rachat par France Télécom de l'opérateur TPSA s'est traduit par une chute massive du personnel, de 70 000 à 32 000 aujourd'hui. Et 6 000 autres suppressions d'emplois sont encore en vue.

Alors, quand Didier Lombard assure «ne pas avoir l'intention de toucher à l'effectif d'Amena»... il est clair que c'est une promesse de menteur.

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