C'est avec émotion que nous avons appris la mort d'un militant trotskyste argentin, Juan Carlos Lopez Osornio, plus connu là-bas sous son surnom «El Pelado Matosas». Jusqu'à son décès, le 10 juillet, à 71 ans, il a milité dans le courant trotskyste créé par Nahuel Moreno. Il faisait partie du MST-El Socialista.

Pelado rejoignit le groupe de Moreno au début des années soixante. De 1964 à 1972, il milita aux Frigorificos Swift puis chez Peugeot. En 1974, il se lia aux travailleurs de la canne à sucre de Jujuy. À la suite d'une de leurs grèves, il fut arrêté et torturé.

Quand le coup d'État militaire éclata en 1976, Pelado était déjà emprisonné. Mais, à la différence de beaucoup de militants assassinés par la junte, il était un prisonnier connu. C'est peut-être ce qui lui sauva la vie.

La prison ne réussit pas à le briser. Dans les différentes prisons où il séjourna, son attitude digne et sa solidarité lui gagnèrent le respect des autres détenus. Il se consacra à éduquer politiquement les militants emprisonnés. Il était aussi soucieux du sort de ses camarades qui continuaient à militer dehors sous la dictature (plus d'une centaine de militants morénistes furent alors assassinés). Pelado ne fut libéré qu'en 1982.

Ces années de détention, au lieu de le démoraliser, l'avaient fortifié. Sa personne dégageait un profond optimisme et une indéfectible joie de vivre. Jusqu'au dernier jour, il est resté fidèle à ses idées, sans se laisser atteindre par les divisions du courant politique auquel il appartenait, fidèle à la conviction que seule la classe ouvrière peut créer un monde juste et sans exploitation.

Nous divergions sur bien des points politiques avec ce camarade, que certains d'entre nous ont connu, notamment il y a vingt ans, lors du rapprochement resté sans lendemain entre nos deux courants, mais nous nous souviendrons de sa personnalité chaleureuse et de la constance de son engagement. Et nous nous associons à la douleur de ses proches et de ses camarades de combat.