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Leur société
Agrocarburants contre aliments : Une organisation sociale démente !
Le prix du baril de pétrole flambe et en même temps ceux du blé et du maïs s'envolent. Car les céréales ne sont plus seulement des matières premières pour l'alimentation mais aussi des sources de carburants, de richesses pour les industriels, et par-là même de misère accrue pour les populations déjà affamées.
Le réchauffement climatique et la diminution des réserves pétrolières sont une aubaine pour les céréaliers et autres industriels de l'agro-alimentaire, et aussi pour ceux du pétrole, qui misent sur cette juteuse reconversion. L'heure est à la transformation des végétaux en carburants dits " verts ", en biocarburants ou agrocarburants. On distille le maïs, le blé, le riz, la canne à sucre ou les betteraves en " bio " éthanol, on extrait l'huile de palme, de colza, de soja ou de tournesol pour les transformer en " bio " diesel.
Les pays riches se sont fixé des objectifs en la matière. L'Europe a pour ambition de couvrir 5,75 % de ses besoins en carburants routiers avec de tels agrocarburants en 2010 et 20 % en 2020. Quant aux États-Unis, ils espèrent bien en produire près de 140 milliards de litres par an. Si on en croit les spécialistes, pour atteindre ces objectifs, il faudrait que l'Europe y consacre 70 % de ses terres agricoles, quant aux États-Unis, ils devraient pour ce faire transformer la totalité de leurs récoltes de maïs et de soja en " pétrole vert ". Mission impossible... et ce sont donc les autres continents - les plus pauvres - qui s'apprêtent à produire encore plus ces agrocarburants, au mépris des cultures vivrières et au prix d'une augmentation du coût des aliments de base.
Pour ne prendre qu'un exemple, en janvier dernier, à Mexico, des milliers de manifestants protestaient contre le doublement du prix de la tortilla, cet aliment de base qu'est la galette de maïs. Car, depuis que de grands groupes industriels se sont avisés des profits qu'ils pourraient engranger en transformant cette céréale en éthanol, la spéculation a fait plus que doubler son prix en deux ans. Ailleurs, notamment au Brésil, après que des forêts ont été brûlées pour laisser place à des plantations de canne à sucre pour la production d'éthanol, ce sont désormais des terres vivrières qui sont plantées en canne ou en soja. Dans ce but, certains envisagent même des plantations de manioc en Afrique ! Que l'augmentation des productions agricoles affament encore plus les populations, c'est là un symbole de l'absurdité et de la démence de l'organisation économique de notre société !
Sur un autre plan, celui de l'environnement, les agrocarburants sont apparemment loin de remplir les promesses de leurs promoteurs. C'est qu'avant de les récolter, il faut répandre des quantités massives d'engrais, utiliser des quantités gigantesques d'eau, puis consacrer de l'énergie pour leur transformation, sans compter les gaz à effet de serre libérés par les incendies qui permettent les déforestations préalables... Les bénéfices attendus seraient ainsi annulés par les mécanismes de leur production.
Ce qui est certain, c'est que la faim tenaille des centaines de millions d'individus : 100 000 personnes meurent de faim chaque jour et 854 millions souffrent de malnutrition. Et si on continue à vouloir remplir les réservoirs avec des aliments, le futur sera bien pire encore.