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- Lutte ouvrière n°2076
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Port autonome de Marseille-Fos - Privatisation des ports : Au service des patrons, au détriment des travailleurs
Vendredi 9 mai, la grève a été de nouveau massivement suivie au Port de Marseille, et dans les six autres grands ports concernés par la réforme adoptée en Conseil des ministres le 23 avril, qui reviendrait à une privatisation des travaux portuaires.
Après les débrayages engagés sur les sept grands ports le 17 avril, et la grève du 23 avril au Port autonome de Marseille (PAM), le mouvement s'est poursuivi dans ce dernier port par des grèves perlées et un ralentissement de l'activité portuaire.
La direction du Port autonome ayant obtenu la condamnation de la CGT en référé vendredi 2 mai à cause de ces actions, celle-ci avait appelé à la grève pour vendredi 9 mai.
On peut en effet craindre les conséquences de cette réforme pour les travailleurs du port. Dominique Bussereau, secrétaire d'État aux Transports, promet un fort investissement de l'État pour la modernisation des ports et ce qu'il appelle " une nouvelle gouvernance " qui permettrait aux patrons de faire travailler le personnel comme ils le voudraient ainsi que l'" unicité du commandement ". Cette " unicité " implique que les transporteurs pourraient faire décharger et charger les navires par le personnel de leur choix, qu'il soit salarié du port ou non. Le résultat en serait, promet-il, un formidable développement du port, ainsi que la création de 30 000 emplois.
D'une part l'on ne peut qu'être inquiet pour les conditions de sécurité dans le travail : le nombre d'accidents et de morts au travail est aujourd'hui important, qu'en sera-t-il demain lorsque les patrons auront carte blanche ?
Quant aux prévisions pour l'emploi on peut être sceptique : le premier volet de ce plan dit de modernisation avait consisté en 1992 dans la privatisation totale de la manutention portuaire qui prévoyait alors aussi la création de 50 000 emplois et d'importants investissements de l'État. Il y avait 8 000 dockers en France en 1992, il n'en reste que 4 000. Quant à la contribution de l'État aux investissements sur les ports, elle n'a été que d'un sixième de ses engagements.
Par contre les promesses du gouvernement vont au devant des rêves des grandes sociétés, car les ports promettent des gains conséquents.
Lorsqu'il s'agit de lancer des accusations contre les grévistes " qui ruineraient le port de Marseille " chacun y va de son couplet. Selon le directeur du port, Guy Janin, " l'armateur Danois Maersk, le n° 1 mondial s'apprête à bouder Marseille ". Les marchandises seraient déroutées sur Gênes, Barcelone et Anvers, d'où des surcoûts estimés par Hervé Balladur, président de la société de transport du même nom, entre 500 et 1 200 euros par conteneur. Sans parler de ce patron de société d'import de matériel de sport d'Asie qui tempête : " J'attends ma première commande : elle est bloquée à Fos. Mais j'ai dû payer cash mes fournisseurs, il me faut avancer la TVA et ma trésorerie est fragile. Vous croyez qu'ils s'en soucient, les agents du port ? ". Eh bien, du fait de la grève, pour une fois il s'en souciera, lui, des agents qui permettent l'arrivée de son matériel !
Ce langage de patrons âpres au gain, les dockers, les employés du port, les employés des compagnies de navigation et les marins l'ont entendu et réentendu à chaque conflit depuis des dizaines d'années.
Et face aux menaces de transfert de 230 à 270 grutiers, portiqueurs et autres agents du PAM, la CGT prévoit d'autres mouvements.