- Accueil
- Lutte ouvrière n°2081
- Après le 17 juin
Leur société
Après le 17 juin
Reconnaissant que la journée du 17 juin n'avait pas été un réel succès, Bernard Thibault et François Chérèque ont trouvé une explication : " La division syndicale a manifestement pesé ". Sans doute. Mais la " division syndicale ", ce n'était pas seulement le fait que FO, l'UNSA, la CFTC et la CGC, opposées à l'accord remettant de fait en cause leur représentativité que la CGT et la CFDT ont signé avec le Medef, soient restées sur la touche. C'est aussi et surtout le savant éparpillement des luttes opéré depuis des mois, pour ne pas dire des années, par la CGT, la CFDT et la FSU qui appelaient à manifester le 17 juin. Pour ne prendre que ces dernières semaines, la Fonction publique a été appelée seule à la grève le 15 mai, les enseignants à manifester le 18 mai, l'ensemble des salariés à une journée d'action le 22 mai, la Fonction publique de nouveau seule à la grève le 10 juin. Et tout cela, sans que jamais les directions syndicales n'expliquent dans le cadre de quel plan de mobilisation s'inscrivent ces actions... pour la simple raison qu'elles n'en ont pas, et ne veulent pas en avoir.
Autre explication fournie par les organisateurs des manifestations du 17 juin : les travailleurs n'auraient pas compris l'enjeu. " S'agissant du temps de travail, écrit l'Humanité du 18 juin, mais la remarque vaut aussi pour la retraite, beaucoup reste à faire pour qu'apparaisse, aux yeux du plus grand nombre, le bouleversement que représente, pour le droit du travail et pour les conditions de vie des salariés, le projet gouvernemental de déréglementation. " Et l'Humanité de citer Chérèque : " Il faut du temps pour expliquer aux salariés qu'on est en train de les tromper. " Mais de qui le dirigeant de la CFDT se moque-t-il ? La grande majorité des salariés sont parfaitement conscients que patronat et gouvernement s'en prennent à leurs conditions de travail et à leur niveau de vie. Seulement, ils ne croientt pas, et à juste titre, que les actions proposées par les directions confédérales puissent imposer un changement de politique. Quand les travailleurs répondent à leurs appels, c'est dans leur immense majorité pour signifier qu'ils en ont " ras le bol ", pas dans l'espoir de faire reculer le patronat et le gouvernement.
Après avoir signé avec le Medef un accord sur l'organisation du temps de travail qui donnait toute satisfaction au patronat, les dirigeants de la CGT et de la CFDT se sont vexés de voir le gouvernement en rajouter une couche sans même les consulter. Ils veulent se voir reconnus par celui-ci comme des interlocuteurs incontournables. Et ce n'est que pour cela qu'ils mobilisent de temps en temps les travailleurs, en faisant tout pour que cette mobilisation ne débouche pas sur une lutte d'ensemble, susceptible d'ébranler le patronat et son État. Bernard Thibault a eu beau dire, le 17 juin : " Nous allons travailler à une rentrée en fanfare ", cette rodomontade risque de se traduire par du pipeau, s'il ne tient qu'à lui et aux autres dirigeants des confédérations syndicales.
Mais l'histoire est riche d'exemples où les travailleurs ont contraint les directions syndicales à aller bien plus loin que ce qu'elles souhaitaient.