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- Lutte ouvrière n°2103
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Leur société
Aubry-Royal : Duel pour quelle politique ?
Les positionnements entre Ségolène Royal et Martine Aubry dans l'empoignade qui les oppose pour la succession de François Hollande ont de quoi laisser songeur.
Ségolène Royal se présente comme la championne du renouveau, voire de la modernité. Pourtant, ni elle ni son équipe ne brillent par la nouveauté. Elle-même, depuis son entrée dans la carrière politicienne, passant en 1982 directement de l'ENA à des fonctions dans l'entourage immédiat de Mitterrand, fut trois fois ministre. Ses proches lieutenants, ces " jeunes loups " impatients de succéder à leurs aînés, ne sont pas des louveteaux de la dernière portée. Vincent Peillon entra, dès 1982, dans le cabinet de Henri Emmanuelli, qui était alors président de l'Assemblée nationale. Autre de ses proches, Francis Collomb, le plus très jeune sénateur maire de Lyon, n'est pas un nouveau-né de la politique.
Quant au discours développé par ce courant, il ne brille pas par sa modernité. Passons sur les homélies de Royal sur la fraternité, sur ses appels à nous aimer les uns les autres et autres vieilleries de sacristie, ses références aux idées prétendument nouvelles de la social-démocratie moderne, incarnée entre autres par l'Anglais Tony Blair ou l'Espagnol José-Luis Zapatero, s'inscrivent dans une tradition de plus d'un siècle ; celle des partis sociaux-démocrates qui participèrent en tant que tels (dès 1914-1920 pour la première fois) à des gouvernements aux côtés de représentants directs de la bourgeoisie.
Martine Aubry, elle, s'est réclamée des traditions d'enracinement du PS dans la classe ouvrière. Elle a plaidé pour que l'on voie désormais des banderoles dans les manifestations ouvrières. C'est vrai qu'on les a peu vues dans les mobilisations pour la défense des retraites ou pour les augmentations de salaires. Mais les états de service de la maire de Lille, où elle siège d'ailleurs avec l'appui du Modem, ne plaident guère en ce sens.
Elle qui, avant d'être ministre de l'Emploi dans le gouvernement Jospin, fut directrice adjointe de Jean Gandois à la tête de Péchiney, se distinguant durant cette période par sa justification de l'utilisation de l'amiante, a laissé son nom à la loi des 35 heures. Accusée, avec une mauvaise foi sans fond par la droite pour avoir donné son nom à cette mesure, elle n'avait pas fait pour autant un vrai cadeau aux salariés. Pas seulement parce que cette loi accordait des contreparties fiscales importantes aux patrons, mais parce qu'elle leur accordait la flexibilité et l'annualisation, c'est-à-dire le droit pour les patrons d'aménager les horaires de travail au gré de leur production.
Ce qui se dégage du désolant spectacle qu'on nous a offert, c'est qu'on aurait bien tort de compter sur une (ou un) secrétaire du PS, quel qu'il soit pour impulser les nécessaires luttes du monde du travail, et encore moins d'espérer que le PS gouverne en faveur de la population laborieuse, s'il revenait aux affaires dans quatre ans, en 2012.