- Accueil
- Lutte ouvrière n°2171
- Réforme du code de procédure pénale : De moins en moins de justice avec de moins en moins de moyens
Leur société
Réforme du code de procédure pénale : De moins en moins de justice avec de moins en moins de moyens
Mardi 9 mars une vingtaine de syndicats de magistrats, d'avocats, de greffiers et de gardiens de prison ont appelé à une « journée morte » de la justice et à une manifestation. Le même jour, la ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie avait présenté son projet de réforme du code de procédure pénale, un texte qui prévoit entre autres la suppression du juge d'instruction.
Désormais les parquets et les procureurs seront chargés des affaires pénales, c'est-à-dire qu'elles seront aux mains des magistrats « aux ordres » car dépendant directement du ministre de la Justice et du gouvernement.
Dans les 215 pages du texte, on trouve aussi une disposition modifiant le délai de prescription des délits et notamment des abus de biens sociaux. Désormais « la prescription de l'action publique court à compter du jour où l'infraction a été commise, quelle que soit la date à laquelle elle a été constatée ». L'ancienne juge, Eva Jolly, spécialiste des affaires politico-financières, estime que cette modification annonce la fin des dossiers économiques et financiers. En effet devant l'opacité qui règne dans le milieu des affaires, seules des enquêtes longues et coûteuses permettaient d'espérer lever un petit coin du voile. Avec cette disposition, ces affaires n'auront presque aucune chance d'être menées à terme dans les délais légaux et seront donc classées sans suite.
Avec la réforme d'Alliot-Marie et auparavant celle de Rachida Dati, c'est effectivement à une « casse de la justice », pour reprendre l'expression d'un magistrat en colère, qu'on assiste. Rachida Dati avait supprimé près d'un tribunal d'instance sur deux, près d'un conseil de Prud'hommes sur trois et une vingtaine de tribunaux de grande instance sur les 181 existants. La population aura ainsi de plus en plus de difficultés à se faire rendre justice dans des tribunaux éloignés et surchargés de travail. Dans les seuls conseils de Prud'hommes, plus de 200 000 affaires sont traitées chaque année et 98,9 % des plaignants sont des salariés victimes de leur employeur. Comment feront-ils quand la fermeture d'un conseil des Prud'hommes voisin les obligera à faire des dizaines de kilomètres à leurs frais pour espérer obtenir satisfaction sur un problème de salaire, d'heures supplémentaires ou de primes non payées ?
Dans le domaine de la justice comme dans les autres, le gouvernement ne vise qu'à faire des économies sur le dos de la population dont l'accès aux tribunaux sera encore plus difficile. Par contre cette justice sera encore plus clémente avec tous ceux dont les affaires douteuses s'accommoderont très bien des délais de prescription modifiés en leur faveur.