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- Lutte ouvrière n°2202
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Autriche - Élections à Vienne : Le succès de l'extrême droite et le recul du parti socialiste
Dimanche 10 octobre à Vienne ont eu lieu des élections pour désigner les conseillers municipaux, qui sont aussi conseillers régionaux, Vienne étant à la fois une ville et un Land, l'équivalent d'une région en France.
Les résultats ont été marqués par un retour spectaculaire du FPÖ, le parti d'extrême droite : avec 27% des voix, il arrive en deuxième position, améliorant son résultat de 2005 de plus de 12,2 points. En fait, ce résultat de l'extrême droite ne correspond pas à un « séisme politique ». En 1999, le FPÖ, alors dirigé par Jorg Haider, avait recueilli 26,9% des voix dans des élections générales. La nouveauté, c'est plutôt le recul du SPÖ (Parti social-démocrate autrichien), qui garde certes la majorité, avec 44,3 % des voix, mais perd la quasi-majorité absolue qui lui avait permis de gouverner la ville sans interruption depuis 1919 (mis à part la parenthèse de la dictature de Dollfuss puis de celle des nazis de 1934 à 1945). L'ÖVP, le parti de la droite chrétienne conservatrice, s'effondre et perd cinq points avec 13,3 % des voix. Les Verts aussi sont en baisse avec 12,2 % des voix, eux qui étaient apparus comme l'étoile montante aux précédentes élections locales.
Ces élections revêtent une importance particulière parce que Vienne est la capitale, et aussi parce que, première capitale dans l'histoire a avoir été gérée par une majorité social-démocrate, elle fait encore aujourd'hui figure de bastion socialiste. Mais aussi parce que ces élections sonnent comme une répétition générale avant les élections législatives de l'an prochain.
Avec sa campagne xénophobe et ouvertement anti-islamique, le nouveau leader du FPÖ, Hans Christian Strache, a pu séduire les plus racistes ou les plus déboussolés de l'électorat, notamment dans l'électorat populaire des quartiers périphériques de Vienne, et particulièrement dans les quartiers HLM, où logent une certaine aristocratie ouvrière ou des employés installés depuis longtemps à Vienne.
Les quartiers ouvriers dans leur ensemble, et particulièrement ceux marqués par une immigration ancienne, ont continué de voter majoritairement pour les sociaux-démocrates. Cependant l'électorat s'y est aussi tourné vers l'abstention, plus importante encore que dans l'ensemble de la ville, elle-même déjà en augmentation de plus de quatre points par rapport à 2005.
Ce vote est en fait une expression du mécontentement des couches populaires à l'égard de la politique menée par les mêmes politiciens de gauche et de droite qui se sont succédé au gouvernement de l'Autriche ces dernières années, le plus souvent ensemble dans des gouvernements de coalition, comme c'est le cas encore aujourd'hui. Récemment encore, le gouvernement du social-démocrate Werner Faynman a réduit le budget de la santé, a durci les conditions pour recevoir les indemnités de chômage, tout comme pour ceux qui reçoivent un revenu minimum de l'État. Les aides aux personnes âgées comme les aides sociales aux familles vont être réduites. Des services publics sont privatisés, comme c'est le cas de certaines activités du chemin de fer. Et même les responsables syndicaux, qui sont aussi souvent députés SPÖ, mais aussi parfois ÖVP, y sont allés de leurs couplets sur le gel des salaires « nécessaire », à quelques mois des négociations salariales dans le pays.
Les résultats du 10 octobre sont la confirmation d'une tendance qui dure depuis plusieurs années. Or la montée de l'extrême droite non seulement n'offrira aucune solution pour les travailleurs, mais elle est en plus une menace pour la classe ouvrière dans son ensemble : le leader de l'extrême droite, Strache, qui s'est récemment prononcé contre la création d'un impôt sur la fortune ou contre la réduction du temps de travail, est aussi un ami personnel du milliardaire Thomas Prinzhorn et fréquente bien des industriels de ce pays. Il n'a cure du sort des travailleurs, ou plutôt des « petits », comme il dit. Bien au contraire, en répandant partout le poison du racisme, la peur de l'étranger, notamment des Turcs nombreux en Autriche, il favorise tout ce qui peut les diviser, détourne leur attention des vrais responsables de la dégradation des conditions de vie : les patrons eux-mêmes. En 2009, le nombre de millionnaires en euros a augmenté de 11% par rapport à 2008, leurs revenus ont augmenté de près de 14% !