- Accueil
- Lutte ouvrière n°2231
- France Télécom : Responsable d'un nouveau suicide
Dans les entreprises
France Télécom : Responsable d'un nouveau suicide
Mardi 26 avril, un salarié de France Télécom s'est suicidé par le feu sur le parking du site de Mérignac en Gironde. Le lendemain, environ 300 personnes ont quitté le travail pour lui rendre hommage et pour exprimer leur réprobation et leur colère. La directrice du centre ainsi que le responsable régional des ressources humaines, qui prétendaient venir à ce rassemblement, ont été invités à passer leur chemin.
Ce salarié, qui travaillait depuis trente ans à France Télécom, avait été embauché comme technicien et était dernièrement chargé par la direction de contrôler les risques liés aux conditions de travail. La direction appelle cela « préventeur ». En fait, notre collègue était coincé entre la pression de l'entreprise, qui voulait faire accepter ses décisions, et sa volonté à lui : faire respecter des conditions de vie et de santé correctes pour ses collègues.
La direction de France Télécom fait semblant de croire que le malaise persistant des salariés est dû aux méthodes de gestion de l'ancienne direction. Mais dans le cas présent les appels au secours, les colères de ce salarié, ses dénonciations étaient bien actuelles. Lui-même militant syndical, il avait été déplacé à plusieurs reprises et disait clairement qu'il était « en souffrance ». En février, il avait dénoncé par mail le manque de moyens pour accomplir sa mission de prévention et avait demandé à être reçu par la directrice. Son appel est resté sans réponse.
En 2009 déjà, il avait écrit une longue « lettre ouverte à mon employeur et à son actionnaire principal » (l'État). Il y analysait sans complaisance les causes du malaise et des suicides, y racontait ses pérégrinations, mutations, discriminations. « Je suis en trop », concluait-il.
Depuis cette date, certes, l'ancien directeur Didier Lombard a été - confortablement - débarqué. Mais la politique du nouveau, Stéphane Richard, est la même, ainsi que le but : la rentabilité maximum.
La pression sur le personnel n'a pas disparu, et il arrive que la hiérarchie en rajoute, comme dans cette unité où elle a refusé d'appliquer une augmentation de temps de pause alors que cela avait été négocié nationalement.
Sur les centres d'appels, les contrôles et les flicages continuent, même si on demande aux managers d'y mettre les formes. Et ce ne sont pas les gadgets - quelques fauteuils de massage par ci, un baby-foot dans une salle de repos par là - qui changeront quelque chose. Car la durée et le rythme de travail restent les mêmes, mesurés par ordinateur à compter de la prise de service sur la position de travail, ce qui permet de suivre les activités du salarié heure par heure, quand ce n'est pas minute par minute.
Bref, des changements pour les salariés, il n'y en a quasiment pas eu. Et la vague de suicides ne s'est pas arrêtée non plus : sur les 60 suicides de salariés qui ont eu lieu depuis trois ans, 27 ont eu lieu depuis 2010.
Par contre le véritable but de France Télécom, augmenter la part des profits, lui, a été atteint. Alors que le chiffre d'affaires de l'entreprise reste stable, les bénéfices ont augmenté d'au moins 30 %. Autrement dit, l'exploitation des salariés continue de s'intensifier.
Stéphane Richard dit vouloir faire toute la lumière sur ce suicide et a demandé une enquête « particulièrement minutieuse et transparente ». Si elle l'était, elle désignerait alors le vrai responsable : lui-même.