Le mouvement des travailleurs de l'atelier qui fabrique l'aspirine sur le site de Rhodia Chimie est entré dans sa cinquième semaine. Depuis le 9 mai, les débrayages continuent deux heures par poste : les travailleurs refusent d'être vendus avec les murs à un repreneur, Novacap, sans contrepartie.

La direction de l'usine ne s'attendait pas à un mouvement si long, suivi par l'ensemble des 24 travailleurs de l'atelier, en poste comme en journée. Elle a d'abord tenté de les intimider, en menaçant de leur pointer huit heures de grève s'ils continuaient à faire la « grève du marteau », c'est-à-dire à refuser d'aller débloquer la production en frappant sur des trémies. Le marteau a donc été repris, mais avec modération, comme écrit dans les consignes de marche. Les travailleurs ont même proposé à l'ingénieur de l'atelier et au directeur du site de venir s'y essayer. Sans grand succès : ces messieurs sont repartis avec quelques douleurs !

Même si un tiers de la production est alors reparti, les retards s'accumulent et la production compte plus de 400 tonnes de retard. Certains clients menacent d'aller se servir ailleurs, prétend la direction, mais c'est elle qui prend le risque de les perdre. Ah ! les lois de la concurrence sont rudes ! Rhodia préfère perdre de l'argent plutôt que de répondre aux revendications, craignant de créer un précédent en lâchant une prime.

En fin de semaine, lors d'une réunion de négociation, la direction n'a pris aucun engagement sur la garantie des accords collectifs après la vente de l'atelier. Elle a proposé une prime de fidélité, de 2 800 euros, mais elle ne concernerait que les salariés « vendus », alors que les six grévistes qui resteraient à Rhodia en seraient exclus. C'est apparu comme une manoeuvre pour diviser les grévistes, et donc inacceptable. Suite à la négociation, les travailleurs d'un atelier du site de Roussillon (dans l'Isère), également vendu à Novacap, ont repris les débrayages.

Depuis le début du mouvement, les grévistes se retrouvent à une vingtaine tous les midis devant l'usine. Cela permet de discuter du mouvement tous ensemble, ainsi qu'avec les autres travailleurs de l'usine. Après cinq semaines de lutte, une trentaine d'heures de grève et une production en berne, la détermination reste intacte.