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Leur société
Xavier Bertrand : La santé et l'art d'arranger les chiffres
Interrogé le 15 septembre sur France Inter, le ministre de la Santé Xavier Bertrand a dressé un tableau idyllique de la santé en France.
À l'entendre, ce qui reste à la charge des patients, après remboursement par la Sécurité sociale et les mutuelles, ne représente que 9,4 % des dépenses, un chiffre en baisse depuis deux ans et quasiment stable depuis 2005 (9 %). L'Assurance maladie prendrait en charge 75,8 % des dépenses, un chiffre lui aussi stable depuis 2005 (76,8 %).
Le ministre choisit les chiffres qui l'arrangent. Le rapport annuel sur les « comptes nationaux de la santé » de la DREES (Direction de la recherche, des études, des évaluations et des statistiques) indique que la Sécurité sociale ne prend en charge que 55 % des soins des malades soignés en ville et que 12 % des dépenses restent à la charge du malade. Pour arriver au chiffre de 75,8 % de prise en charge, Xavier Bertrand prend en fait la totalité des malades, notamment les 9 millions de patients bénéficiant du système des ALD (affections de longue durée), dont les soins sont pris en charge à 100 % et sont les plus coûteux, représentant près de 62 % des remboursements pour seulement 20 % des assurés sociaux. Alors bien sûr, la moyenne monte... et le ministre peut faire le beau.
Mais, contrairement à ce que dit Xavier Bertrand, la réalité que vérifient tous les jours des millions d'assurés -- ALD ou pas -- est que, depuis des décennies, ils ont toujours plus à payer. C'est par exemple la dernière augmentation du forfait hospitalier, passé de 16 à 18 euros dans les hôpitaux et les cliniques et de 12 à 13,5 euros dans les établissements psychiatriques. C'est encore en mars 2011 le passage de 91 à 120 euros de la franchise hospitalière pour les soins coûteux. Au total, d'après un rapport de 2008, 547 euros c'est le reste à charge par personne et par an d'un assuré en 2008, soit plus du double de ce qui lui restait à charge en 1980.
Alors, il faut être Xavier Bertrand pour ne pas reconnaître que de plus en plus de gens doivent renoncer ou repousser à plus tard des soins, faute de moyens. En 2010, d'après un rapport du CISS (Collectif interassociatif sur la santé), ils étaient 26 % pour l'ensemble des assurés et 38 % pour ceux touchant la CMU. Et c'est sans doute pire encore pour les quatre millions de malades qui n'ont pas les moyens de se payer une mutuelle.
Xavier Bertrand a osé dire sur France Inter qu'en France, pour vous soigner, on ne vous demande pas une carte bleue mais la carte verte Vitale. Mais non, c'est bien de plus en plus la carte bleue qui décide des soins.