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- Lutte ouvrière n°2292
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Italie - la réforme du droit du travail : Les patrons pourront licencier comme ils veulent
« Le travail n'est pas un droit », a déclaré la ministre du Travail Elsa Fornero lorsque, le 28 juin, le Parlement italien a adopté définitivement la nouvelle législation du travail proposée par le gouvernement Monti. Sa déclaration a fait scandale et elle a dû se corriger, mais son tort n'est que d'avoir affiché trop clairement le but de la réforme, ou plutôt des contre-réformes que Monti, depuis qu'il a succédé à Berlusconi en décembre dernier, mène tambour battant.
Après l'augmentation de l'âge de la retraite, il fallait paraît-il en finir avec le fameux article 18 du Statut des travailleurs adopté en 1970, interdisant les licenciements sans « juste cause » et obligeant les employeurs, en l'absence de celle-ci, à réintégrer le travailleur licencié.
C'est donc chose faite : l'article 18 subsiste, mais il a été pratiquement vidé de son contenu. Seule reste la notion de licenciement « discriminatoire », qui pourrait donner lieu à réintégration à condition de le faire reconnaître comme tel par un tribunal. En compensation, si l'on peut dire, l'indemnisation du chômage, très limitée, sera un peu revue à la hausse.
Peu gêné, le gouvernement a présenté sa réforme comme devant mettre fin à une injustice, celle permettant la protection des travailleurs en contrat à durée indéterminée contre le licenciement, alors que les travailleurs en contrat précaire, dont le nombre a explosé, n'en ont aucune. Cette prétendue justice consiste donc en ce que désormais ce sont tous les travailleurs que le patronat pourra licencier sans difficulté !
Tout cela fait suite à des mois d'une campagne selon laquelle la crise de l'économie s'expliquerait par le manque de flexibilité de la main-d'oeuvre, la trop grande protection des travailleurs contre le licenciement, qui arrêterait les investisseurs. Le mensonge est énorme. Le patronat italien a d'ailleurs su contourner l'article 18 en multipliant à l'infini les formes de contrats précaires. Cela va de l'interim aux prétendues « coopératives » et au travailleur individuel considéré comme entreprise indépendante et devant se charger lui-même, s'il y tient, de payer des cotisations sociales et la TVA ; sans parler du travail noir largement pratiqué, notamment au Sud, et souvent contrôlé par la Mafia.
Peu importe que, lors d'un sondage auprès des patrons allemands sur ce qui pourrait les décourager d'investir en Italie, aucun n'ait invoqué la difficulté de licencier, mais plutôt la corruption, la Mafia, les problèmes administratifs. Le mensonge éhonté des médias, du gouvernement, des principaux partis obéit simplement au désir des patrons italiens de pouvoir licencier quand et comme ils veulent et de pouvoir soumettre leur main-d'oeuvre à tous les chantages. On parle d'ailleurs maintenant de rendre les travailleurs du public aussi facilement licenciables que ceux du privé, toujours bien sûr sous prétexte de justice.
Le chantage permis par la crise de la dette, le soutien des principaux partis, la collaboration des directions syndicales, ont permis à Monti de faire passer les volontés du capital pour l'intérêt général. Mais le seul résultat de ces mesures, s'ajoutant à des plans d'austérité successifs censés préparer pour plus tard le retour de la croissance, est d'enfoncer le pays dans la pauvreté et la précarité généralisée.