Crimée : Un droit à géométrie variable12/03/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/03/une2380.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Crimée : Un droit à géométrie variable

Ce n'est pas le souci des intérêts de la population russophone de Crimée qui anime le président russe Poutine quand il soutient ceux qui réclament la séparation de la Crimée d'avec l'Ukraine. Et personne ne peut oublier quelle guerre terrible le Kremlin a menée contre la population de la petite Tchétchénie pour empêcher qu'elle ne se détache de la Russie, après l'effondrement de l'Union soviétique.

Mais il faut un certain culot en même temps qu'un complet mépris du droit des peuples pour, tels Obama et ses homologues ouest-européens, invoquer le « droit international » à propos du territoire actuel de l'Ukraine et caractériser comme « illégal » le référendum du 16 mars sur l'avenir de la presqu'île de Crimée et de ses deux millions d'habitants.

Un président américain défendant, soixante ans après, la décision de Khrouchtchev, chef de la bureaucratie soviétique, de détacher la Crimée de la Russie pour la rattacher à l'Ukraine, ce serait presque cocasse. À condition d'oublier qu'en 1954, Russie et Ukraine faisant partie d'un même pays, cette mesure n'avait de conséquences qu'administratives pour ses habitants. À condition aussi de vouloir ignorer que la situation a radicalement changé quand l'éclatement de l'URSS, fin 1991, a dressé des frontières d'État entre et au milieu des peuples de ce pays, multipliant ainsi les situations où des minorités se sentent nationalement opprimées.

Les dirigeants occidentaux le savent, mais n'ont d'état d'âme quant au droit des peuples que lorsque cela sert leurs intérêts.

Ainsi, non loin de l'Ukraine, États-Unis et Union européenne ne se sont pas privés de soutenir au Kosovo, province de la Serbie après l'éclatement de la Yougoslavie en 1991, un droit à se séparer qu'ils dénient aujourd'hui à la Crimée. Il est vrai que les dirigeants serbes d'alors n'étaient pas assez soumis au goût des puissances impérialistes. En revanche, les dirigeants ukrainiens actuels se veulent de fidèles relais de leurs intérêts. Et ces grandes puissances ont d'autant moins de raisons de soutenir le séparatisme en Crimée qu'il pourrait renforcer Moscou.

Quant aux peuples de la région - ukrainien, russe ou les tatars de Crimée, jadis chassés de chez eux par Staline - non seulement leurs droits comptent pour rien dans le bras de fer opposant l'Occident à la Russie, mais leur situation, déjà aggravée par l'éclatement de l'URSS, risque d'empirer, quel que soit le résultat du référendum du 16 mars.

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