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Leur société
Front national : comment gagner des voix et rassurer le patronat
Dans un billet publié dans un mensuel économique régional, le patron nordiste Bruno Bonduelle a appelé à s’opposer à une éventuelle victoire de Marine Le Pen aux élections régionales. En lui reprochant de prôner des positions politiques, comme la fermeture des frontières, susceptibles de faire fuir les investisseurs, cet industriel, fondateur d’un grand groupe de l’agro-alimentaire, est certainement représentatif de toute une partie du milieu patronal.
En compétition avec le FN, le candidat Les Républicains Xavier Bertrand cherche à jouer sur la peur suscitée par la démagogie de l’extrême droite dans l’électorat de droite, reprochant à Marine Le Pen de s’être prononcée en faveur de la retraite à 60 ans, d’une augmentation des salaires et des pensions. L’ancien ministre de Sarkozy peut sans rire qualifier « d’extrême gauche » le programme économique du FN.
Sa démagogie a certainement permis au FN de gagner des voix dans les milieux populaires ces dernières années. Mais Marine Le Pen sait que pour arriver au pouvoir, il lui faut rassurer les milieux patronaux et leur prouver sa capacité à se montrer responsable et soucieuse de la « défense des entreprises ».
Dans sa campagne, interrogée sur l’emploi par la Voix du Nord, la dirigeante du Front national a déclaré avoir pour priorité : « être aux côté des entrepreneurs régionaux. » Dans ses discours, elle évoque plus particulièrement la « défense des PME », exactement comme tous les autres politiciens qui utilisent cet argument pour justifier toutes les aides versées au grand patronat.
Un autre thème de campagne du FN est la baisse de la fiscalité régionale. Pour la financer, la recette du parti d’extrême droite est simple : supprimer des emplois dans la fonction publique. C’est une méthode que tous les patrons ne peuvent manquer d’approuver et de trouver raisonnable. Mais les représentants du FN se gardent bien de préciser au détriment de quels services elle serait appliquée, et avec quelles conséquences pour les usagers.
Enfin, alors que les « entrepreneurs » considèrent très majoritairement que l’euro favorise leurs affaires, Le Pen doit aussi atténuer son discours antieuropéen afin de les rassurer. Ainsi, répondant aux journalistes qui l’interrogeaient sur ce que serait sa politique vis-à-vis de l’Union européenne si elle arrivait au pouvoir, Marine Le Pen a déclaré : « Je demanderai un référendum, et dans l’attente de l’organisation de ce référendum, je ferai comme le Royaume-Uni, j’irai poser mes exigences… Et si l’Union européenne rend au peuple français sa souveraineté, je dirai aux Français : “Nous pouvons rester dans l’Union européenne.” » La formulation a l’avantage de laisser la porte ouverte à bien des reculades sur cette question.
Comme tous les autres partis du système que Le Pen prétend dénoncer, le FN sait que pour avoir le droit de s’occuper des affaires de la bourgeoisie, il faut montrer patte blanche. Il montre ainsi son véritable visage, celui d’un parti bourgeois et antiouvrier.