Île de La Réunion : le Grand Port maritime, au bonheur des armateurs10/02/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/02/2480.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Île de La Réunion : le Grand Port maritime, au bonheur des armateurs

Le 27 janvier a eu lieu l’inauguration, après agrandissement, du Port de La Réunion. Les travaux de creusement de la darse à 15,5 mètres de profondeur et l’allongement du quai de 160 mètres supplémentaires avaient été lancés en août 2014 en présence de François Hollande. Ces travaux, auxquels s’est ajoutée la création de trois nouveaux portiques, ont coûté plus de 80 millions d’euros, financés en totalité par des fonds de l’Europe, de l’État et du Grand Port maritime Réunion, lui-même établissement public de l’État.

Cet argent public a été avant tout dépensé pour servir les sociétés de manutention et les armateurs. Le groupe qui compte tirer le maximum de profit du trafic portuaire est la CMA CGM, le troisième plus grand armateur mondial de porte-conteneurs. Il prend possession de son hub de transbordement devant relier les ports de l’Europe du Nord à ceux de la zone océan Indien et de l’Afrique, via La Réunion.

À terme, les dirigeants de la CMA CGM, ainsi que ceux du Grand Port maritime Réunion, misent sur une intensification du trafic le long de l’ancienne route des Indes, qui irait de pair avec un développement économique espéré des pays du Sud. Port Réunion espère conquérir 10 % du trafic desservant actuellement le sud de l’Afrique de l’Est en récupérant une partie du trafic maritime aujourd’hui géré par les ports de l’île Maurice, ou de Durban en Afrique du Sud.

Que le monde patronal soit satisfait des travaux engagés au port, qui lui ont bien peu coûté, rien de plus normal. Que des travailleurs espèrent, parfois sans trop y croire, que les nouvelles installations amèneront de nouveaux emplois, cela est compréhensible. Mais quand des syndicalistes se font les faire-valoir, voire les porte-voix des patrons, en semant parmi les travailleurs l’illusion que le développement du port et surtout l’arrivée de CMA CGM dans l’île ne pourront être que bénéfiques pour eux, ils quittent alors le terrain de la défense de leur classe. Il n’y a pas à remercier par avance les patrons parce qu’ils créeront (peut-être) quelques emplois mais à mettre en garde les travailleurs en leur disant que ce qu’ils obtiendront le sera grâce aux pressions qu’ils pourront eux-mêmes exercer, y compris dans le domaine de l’emploi.

Ce n’est pas dans cette voie que se sont engagés le maire de la ville du Port, l’ancien secrétaire général de la CGT Ports et Docks, ainsi que l’actuel dirigeant de ce syndicat de salariés. Tous parlent « d’une excellente initiative attendue depuis 1986 », d’un projet auquel ils ont « toujours cru » ; l’un d’eux poussant même les louanges jusqu’à dire que CMA CGM est « chez elle » à La Réunion.

Ces syndicalistes, proches ou anciennement proches du Parti communiste réunionnais, reprennent à leur compte et diffusent parmi les travailleurs la propagande fallacieuse, maintes fois véhiculée par ce parti, affirmant que ce qui serait bon pour « le développement de La ­Réunion », autrement dit pour les patrons, le serait également pour les travailleurs.

Mais les patrons, très conscients que leur intérêt ne se confond pas avec celui des travailleurs qu’ils emploient, sont bien plus circonspects. Le seul geste concret fait à ce jour par la CMA CGM a été la transformation de 26 contrats CDD en CDI pour des dockers, sous la pression de ceux-ci d’ailleurs.

En fait tous les patrons du port comptent bien rentabiliser les investissements qui ont été réalisés pour eux en augmentant la cadence de travail, notamment en faisant tourner le port 24 heures sur 24, par le prêt de main-d’œuvre entre acconiers, une façon de vouloir embaucher le moins possible.

Mais si les capitalistes ont de telles ambitions les concernant, les travailleurs du port sauront réagir en fonction de leurs intérêts, comme ils l’ont déjà montré à plusieurs reprises.

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