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Grande-Bretagne : le gouvernement du Brexit sur la corde raide
La crise politique ouverte par l’annonce de la démission de Cameron, après son échec lors du référendum sur le Brexit, n’aura pas duré longtemps. Le 11 juillet, Theresa May, sa ministre de l’Intérieur depuis 2010, a pris sa succession. La relève de Cameron n’aura donc pas causé les remous politiques que craignaient les milieux d’affaires, à un moment où les marchés financiers restent des plus chaotiques.
Pour arriver à ce résultat, les hautes sphères du parti conservateur ont pesé de tout leur poids pour obtenir des rivaux de May qu’ils se retirent de la course. Dès lors, il n’était plus nécessaire de recourir à l’arbitrage de la base du parti qui, travaillée par la démagogie des ténors du Brexit, risquait d’élire l’un d’entre eux.
Du coup, on en arrive à la situation paradoxale d’une Premier ministre qui, après avoir soutenu le maintien de la Grande-Bretagne dans l’Union européenne avant le référendum, dirige un gouvernement censé organiser la sortie du pays de cette même Union, avec un personnel politique en grande partie eurosceptique.
Mais cette situation est moins paradoxale qu’il n’y paraît. Après tout, ni les cercles dirigeants de la bourgeoisie britannique ni les nombreuses multinationales qui ont choisi la Grande-Bretagne comme base logistique pour leurs opérations européennes ne souhaitaient le Brexit. Et aujourd’hui, elles cherchent avant tout à limiter les dégâts. Le rôle de Theresa May est donc moins d’assurer la sortie du pays de l’UE que de faire en sorte que les grandes entreprises basées en Grande-Bretagne conservent leur libre accès au marché de l’Union.
Theresa May l’a elle-même souligné lors de sa prise de fonction, en affirmant d’un côté qu’elle entendait se soumettre à la volonté de l’électorat, et en ajoutant dans le même souffle qu’elle n’entendait pas enclencher avant 2017 les négociations officielles de sortie de l’UE, suivant la procédure prévue par l’article 50 du traité de Lisbonne, et que la Grande-Bretagne en resterait membre au moins jusqu’en 2019.
D’ici là, il y aura bien des marchandages. Ils ont d’ailleurs déjà commencé par une tournée de Theresa May dans les principales capitales européennes, dont l’objectif essentiel sera sans doute de calmer la spéculation sur les marchés financiers, qui affecte sérieusement le système bancaire, tant en Grande-Bretagne que dans l’UE.
Mais il peut aussi se produire bien des rebondissements. Les bourgeoisies britannique et européenne ont sans doute tout intérêt à trouver un arrangement qui maintienne le statu quo dans leurs relations économiques. Mais cela ne veut pas dire que les unes et les autres ne chercheront pas à profiter de l’occasion pour tirer la couverture à elles.
Par ailleurs, du côté britannique, même si le vide institutionnel a été comblé pour l’instant, les surenchères xénophobes qui avaient été à l’origine du référendum, ne sont pas près de s’arrêter, entre la droite conservatrice d’une part, et de l’autre un parti souverainiste Ukip désormais ouvertement anti-immigrés.
Autant dire que le nouveau gouvernement va se livrer à un jeu d’équilibre dont les premières victimes risquent d’être les travailleurs immigrés, et, à travers eux, si elle se laisse faire, la classe ouvrière dans son ensemble.