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Leur société
Attentats du 13 novembre : commémorations et écran de fumée
Ce 13 novembre 2017 a été l’occasion de commémorer les attentats de 2015, qui avaient fait 130 morts et 350 blessés au Stade de France à Saint-Denis et dans des cafés de Paris, puis dans la salle de concerts du Bataclan : une horreur que Daech avait revendiquée.
De Macron à son prédécesseur Hollande, de Valls qui était alors Premier ministre à la maire PS de Paris Anne Hidalgo, à Pécresse la présidente de droite de l’Île-de-France, etc., ces cérémonies ont fourni matière à se montrer. Discours, dépôts de gerbes, étreintes de survivants devant les caméras, tweets « Restons unis » ou « On ne vous oubliera pas » relayés aussitôt par les médias, rien n’a manqué.
Il y a certes eu quelques couacs : le fils d’une victime a déclaré qu’il refusait d’aller serrer la main à Macron, des avocats de victimes ont rappelé que les aides promises tardaient encore à venir deux ans après. Mais, pour bien convaincre que les autorités ne restaient pas les bras croisés, on a fait savoir que six juges d’instruction travaillaient sur le dossier. Résultat : 220 tomes de procédure ont déjà été constitués, 28 000 procès-verbaux dressés, 13 personnes mises en examen, 7 mandats d’arrêt internationaux lancés… Cette tâche gigantesque devrait aboutir vers 2019, et donnerait déjà des « clés de lecture » de la tuerie, selon les mots du procureur de la République de Paris.
Pourtant, s’il est beaucoup question de la cellule terroriste qui a commis cette boucherie, de ses liens avec la mouvance islamiste de divers pays, en haut lieu ou dans les médias, il n’y a pas eu la moindre allusion à ce qui pourrait vraiment éclairer le contexte de ces attentats : les responsabilités multiples de l’État français dans le développement du terrorisme.
Les groupes djihadistes ne sont pas nés de rien. Les grandes puissances et leurs alliés dans la région comme la Turquie et l’Arabie saoudite, y ont collaboré. La France a cru un moment pouvoir s’en servir et en a armé une partie par l’intermédiaire de ses services secrets. Alors s’il y a enquête sur les causes de la tragédie du 13 novembre, la moindre des choses serait aussi de faire la lumière sur les obscures manœuvres des différents États occidentaux qui ont abouti à la constitution de ces groupes terroristes qui se sont ensuite retournés contre eux.
Mais pour savoir quel rôle ont joué les manigances des services secrets et les interventions de l’armée française au Proche-Orient, par quelles manœuvres la diplomatie, secrète ou non, de l’État français dans cette région y a défendu ses intérêts et ceux de quels grands groupes, mieux vaut ne pas compter sur les prétendues clés de lecture que concocte la justice. La seule lecture qu’elles offrent est celle qui exonère totalement l’État français.
Pour savoir quelles abjections, il y a un siècle, les puissances dites civilisées, telles la France et l’Angleterre, avaient couvertes, facilitées et provoquées dans la Russie des tsars, quelles firmes et banques y trouvaient leur compte à Londres et Paris, il a fallu pas moins d’une révolution victorieuse à Petrograd, en Octobre 1917. Car ce n’est qu’alors que les traités secrets – et ce qu’ils prévoyaient sur le dos des peuples – entre les grandes puissances et la Russie ont pu être dénoncés et étalés au grand jour. Il a fallu que le pouvoir soviétique publie les archives secrètes de la Russie pour révéler que toute la presse française de l’époque avait été achetée par le tsarisme, pour couvrir sa barbarie d’un voile louangeur.
Le terrorisme d’État des grandes puissances, leurs agissements contre les peuples partout dans le monde, forment le terreau sur lequel prospèrent des groupes comme celui qui s’est livré à un bain de sang à Paris voici deux ans. Mais il ne faut pas s’attendre à voir la justice faire la lumière sur les dessous de cette politique.