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La Poste Paris : des facteurs toujours moins nombreux
La Poste s’est récemment retrouvée sous les projecteurs des médias avec l’émission Envoyé spécial la concernant. Les postiers ont pu y voir la direction épinglée et la dégradation de leurs conditions de travail dévoilée au grand public.
À Paris, depuis plusieurs années, La Poste s’est appliquée à morceler les grands bureaux. Ainsi, à l’occasion de la transformation du bâtiment de la poste du Louvre en hôtel de luxe, les facteurs qui desservaient les quatre premiers arrondissements de Paris ont été répartis sur deux sites en novembre 2015. Les distributeurs de colis étaient auparavant partis vers la filiale Colipost, et la préparation du courrier relevé était déplacée dans les centres de tri industriel de banlieue. Il y a eu ensuite, comme partout, les restructurations des tournées de facteurs tous les ans et demi, puis tous les deux ans. À chaque fois, c’est 10 à 15 % des tournées qui disparaissent, rallongeant d’autant celles qui restent. Pour les facteurs, ce n’est pas seulement une charge et des distances supplémentaires, mais aussi tous les liens avec les usagers de leur secteur qui sont ignorés. Au final, d’un bureau de 2000 personnes jusqu’à la fin des années 1990, on en est arrivé avec cette fermeture de 2015 à deux sites de distribution du courrier de 300 et 250 personnes.
Mais les dernières innovations pour transformer le métier de facteur, afin de réduire le personnel, sont encore d’un autre niveau. C’est Philippe Dorge, un ancien dirigeant de PSA passé à La Poste, qui est à la manœuvre comme responsable du courrier au niveau national.
Alors qu’auparavant chaque facteur préparait sa tournée au bureau puis partait la distribuer, il a entrepris de séparer ces deux tâches. Son idée : créer des postes de préparateurs qui passeront leurs journées de 6 h 15 à 13 h devant le casier de tri à préparer des tournées de facteur et d’autre part des postes de distributeurs qui eux passeront leurs journées dehors de 9 h à 16 h 30 ou 17 h, samedi après-midi inclus. Il y a eu aussi la création des « îlots ». Avec la division des tâches, les distributeurs peuvent très bien être installés par petits groupes de six ou dix dans des locaux au plus près de leurs tournées. Cela évite, selon la direction, tous les déplacements à vide. Autre avantage pour elle : ne plus payer la pause du midi ni la prime pour longue vacation qu’elle donnait aux facteurs du matin. Ainsi, à ce jour, les facteurs de l’ancienne poste du Louvre sont dispatchés sur sept sites différents… et on est à la moitié du processus.
Comme si tout cela ne suffisait pas, la distribution de la publicité a récemment atterri dans les chariots des facteurs. La Poste leur a donné ce travail à faire, alors qu’il était autrefois effectué par Médiapost. Une partie des distributeurs de cette filiale de La Poste y ont perdu leur emploi. Quant aux facteurs, certains jours ou sur certaines tournées, il peut y avoir en volume presque autant de publicité que de courrier. Si l’on ajoute que des tournées rallongées peuvent se traduire par 50, 60 ou 80 lettres recommandées à distribuer, cela peut vite devenir insurmontable. Des anciens ne reconnaissent plus le travail qu’ils ont connu. Des jeunes, embauchés ou intérimaires, pensent assez vite aller voir ailleurs.
Le mécontentement s’exprime à certaines occasions, comme par exemple la dernière journée de grève sur les retraites, qui a été largement suivie par les facteurs des 1er et 2e arrondissements, qui vont être à nouveau restructurés en octobre.
La direction s’ingénie à morceler le personnel en même temps qu’elle lui pourrit la vie. Cela mérite une riposte d’ensemble et, dans ces conditions d’isolement croissant, le plus tôt serait le mieux.