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Multinationales : un impôt indolore
Il aura fallu un an et demi à l’Union européenne pour adopter le taux minimal de 15 % de l’impôt sur les bénéfices des multinationales, qui avait déjà fait l’objet d’un accord entre grandes puissances du G7 en juin 2021, sur proposition des États-Unis.
Ce n’est toutefois pas avant 2024 que ce taux, adopté le 15 décembre, devrait entrer en vigueur en Europe… du moins sur le papier. Cela laisse tout le temps aux multinationales de modifier les circuits financiers, légaux ou non, destinés à minimiser leurs impôts, ce qu’elles ont toujours fait. Par exemple Total, l’entreprise française la plus importante, n’a pas payé d’impôt sur les bénéfices en France plusieurs années de suite.
On peut donc douter sérieusement des affirmations triomphantes des dirigeants politiques qui s’extasient sur leur propre audace. Macron, dont la politique est de faire baisser constamment les impôts des entreprises et des riches particuliers dans le pays, a ainsi salué « une avancée majeure pour toutes celles et ceux qui tiennent comme nous y tenons à la justice fiscale ».
En 2021, Olaf Scholz, qui était à l’époque le ministre des Finances allemand, avait décrit cet accord comme « une mauvaise nouvelle pour les paradis fiscaux du monde entier ». Cela peut faire sourire, treize ans après la rodomontade de Sarkozy déclarant lors d’un précédent G7 : « Les paradis fiscaux c’est terminé ! » On en est loin. Au contraire, le juge à la retraite Renaud Van Ruymbeke, spécialiste des paradis fiscaux après s’être occupé d’affaires d’évasion fiscale, a déploré récemment que « les économistes évaluent à 8 700 milliards de dollars environ le montant des avoirs cachés dans les paradis fiscaux ».
Alors, les mesures fiscales « historiques » annoncées par l’UE n’empêcheront pas les grandes entreprises multinationales de continuer à échapper à l’impôt.