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Leur société
Loi Immigration : les responsabilités de la gauche de gouvernement
Au lendemain du vote de la loi Asile et immigration, les partis de gauche du Parlement ont dénoncé la collusion de Macron avec l’extrême droite et parlé d’une « trahison » qui « souille la République ».
Cette loi est une infamie. Mais comment être surpris si Macron a repris les préjugés de l’extrême droite et est allé chercher les voix de LR et du RN ? C’est laisser entendre, bien à tort, que le président de la République, le Parlement ou le Conseil constitutionnel pourraient être des gardiens des valeurs progressistes ou des intérêts des plus précaires.
En titrant « Monsieur le Président, ne promulguez pas cette loi ! », l’Humanité du 21 décembre s’est fait le porte-parole des partis de gauche, du PCF au PS en passant par LFI et EELV, et de multiples associations et syndicats, dont la CGT, la FSU ou la LDH. Ces responsables ont écrit ensemble à Macron pour lui demander « de renoncer à une loi qui porte atteinte aux valeurs fondamentales de notre République » et pour affirmer « qu’une digue a lâché ». Évidemment, la quasi-totalité des signataires de cette lettre ayant explicitement appelé à voter Macron au deuxième tour de la présidentielle de 2022 « pour faire barrage à Marine Le Pen », ils gémissent quand Macron montre qu’il s’en fiche.
Il faut aussi une sacrée dose d’hypocrisie pour affirmer que la digue vient de lâcher. Les appels réitérés depuis 2002 à voter pour un candidat ouvertement antiouvrier, comme Chirac puis Macron, sous prétexte de faire barrage à Jean-Marie Le Pen n’ont en rien empêché la progression des idées d’extrême droite. Depuis vingt ans, les lois relatives à l’immigration et au séjour des étrangers se sont succédé, les nouvelles étant presque toujours pires que les précédentes. À peine Le Pen « battu dans les urnes » en 2002, Sarkozy, ministre de l’Intérieur, aggravait la loi. Élu président de la République en 2007, il durcissait les conditions du regroupement familial puis celles pour être naturalisé en 2011. Mais en décembre 2015, après les attentats et sous pression de la droite, c’est un gouvernement de gauche, sous Hollande et Valls, qui a proposé d’élargir l’application de la déchéance de la nationalité pour les faits de terrorisme.
La gauche porte une responsabilité plus fondamentale encore dans l’évolution réactionnaire de la société. En menant pendant des décennies, à la tête de l’État, les politiques exigées par le patronat, accompagnant les suppressions d’emplois ou mettant en musique la précarité, elle a désarmé et écœuré les travailleurs. En remplaçant méthodiquement les références à la lutte de classe et l’internationalisme ouvrier par les prétendues valeurs de la république et le nationalisme français, elle a préparé le terrain aux idées xénophobes. C’est tout cela qui a fait le lit de l’extrême droite et des démagogues à la Ciotti, Le Pen ou Zemmour.
Pour enrayer cette évolution mortelle, il ne faut surtout rien attendre du cirque parlementaire mais s’atteler à faire revivre dans le monde ouvrier la conscience de classe et la conviction qu’il peut en finir avec cette société.