La CMA CGM et l’état : un amour indéfectible18/12/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/12/une_2942-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

La CMA CGM et l’état : un amour indéfectible

L’armateur CMA CGM a recruté depuis 2021 une dizaine d’anciens conseillers ministériels. Son directeur financier, Ramon Fernandez, est un ex-directeur du Trésor et un ancien numéro deux d’Orange. La directrice du cabinet du PDG du groupe Rodolphe Saadé, Camille Andrieu, est une ancienne magistrate à la Cour des comptes. Et ce ne sont là que deux exemples parmi des dizaines.

Le cas de la CMA CGM est banal, près de la moitié des dirigeants du CAC 40 est passée par la haute fonction dite publique d’après l’Observatoire des multinationales. Cela n’en demeure pas moins un exemple instructif. À l’origine du trust, il y a le bradage en 1996 de la Compagnie générale maritime (CGM). Juste avant sa privatisation, le gouvernement Juppé avait renfloué cette entreprise d’État à hauteur de 3,3 milliards de francs, pour ensuite la céder pour… 20 petits millions de francs à la CMA de Jacques Saadé, le père de Rodolphe. Celui-ci était très proche du RPR et de son chef, Chirac : la connexion entre l’entreprise et l’État ne date donc pas d’hier.

En 2004, le gouvernement fit un autre cadeau au géant des mers, en permettant que les compagnies maritimes n’aient plus à payer l’impôt sur les sociétés mais soient imposées sur le tonnage de leurs navires. Sur la seule année 2023, cette niche fiscale a fait gagner la bagatelle de 5,6 milliards aux armateurs, CMA CGM en tête. Bien entendu, pour tout cela, les relais au sein des ministères sont bienvenus. Dominique Bussereau, le secrétaire d’État à la mer qui fit adopter cette taxe en 2004, est, depuis 2013, membre du conseil d’administration de CMA CGM.

Pourtant, bien des instances, telles que la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, parlent régulièrement de « conflits d’intérêts », comme si l’État avait un intérêt propre et distinct de celui de la bourgeoisie. Mais, comme on voit, cela ne sert pas à grand-chose, sinon à maintenir la fameuse idée d’un prétendu « intérêt général », autrement dit à nier la division de la société en classes aux intérêts opposés.

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