Émeutes de 2005 : rien n’a changé, sinon en pire29/10/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/10/une_2987-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Émeutes de 2005 : rien n’a changé, sinon en pire

Le 27 octobre 2005, Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, mouraient dans l’enceinte d’un transformateur électrique à Clichy- sous-Bois, où ils avaient cru trouver un refuge pour se protéger d’un contrôle de police. Leur mort a déclenché trois semaines d’émeutes dans le pays.

La peur de la police avait provoqué la fuite d’une bande de gamins jouant au football sur un terrain vague. Les enregistrements des échanges radio entre policiers révélèrent qu’ils savaient la vie des jeunes en danger : « S’ils entrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau », disait l’un d’eux. La patrouille était repartie sans prévenir les secours.

Mis en examen pour non- assistance à personne en danger, les policiers en cause ont été blanchis par les tribunaux en 2015. Cette clémence rappelle clairement le mépris, l’arrogance et le racisme policiers, déclencheurs des émeutes de 2005, comme ils l’ont été en 2023 après l’exécution de Nahel par un policier à Nanterre. Parmi les incendiaires de 2005, il faut aussi compter celui qui était ministre de l’Intérieur de Chirac, Nicolas Sarkozy. Avant la mort de Zyed et Bouna, il avait, en visite en banlieue parisienne, stigmatisé « la racaille » et parlé d’utiliser contre elle le « Karcher ». Il mentit sans vergogne en prétendant que Zyed et Bouna étaient des voleurs fuyant la police, mensonge repris par le Premier ministre, de Villepin. Le gouvernement mettait de l’huile sur le feu en couvrant, comme de coutume, les exactions policières.

Mais si ces étincelles ont déclenché l’incendie, c’est aussi que le terrain était hautement inflammable. Le chômage, l’absence d’infrastructures – il fallait alors 1 heure 20 de transports en commun pour aller de Paris à Clichy-sous-Bois, 15  kilomètres – la dégradation des services publics avaient fait des quartiers des ghettos où le contrôle au faciès et les interventions brutales de la police, le mépris des ministres devenaient les manifestations les plus courantes de l’État. Et si la droite était alors au pouvoir, la gauche et le Parti socialiste, avec ou sans le PCF, y avaient été quinze ans durant dans la période précédente. Et, quand éclatèrent les émeutes et que Chirac instaura l’état d’urgence le 8 novembre, François Hollande, premier secrétaire du PS à l’époque, s’aligna sur cette décision au nom du retour à l’ordre républicain.

Comme en 2023, les émeutes de 2005 ont mis le feu aux quartiers populaires, brûlé des voitures, des édifices publics dans une rage finalement stérile. Le gouvernement y répondit par la matraque, les arrestations par centaines, les procès expéditifs, les couvre-feux sur des villes entières ou des quartiers, comme celui de la Madeleine à Évreux, qui tous les soirs était bouclé par des grilles métalliques surveillées par des policiers.

Le 4 janvier 2006, Chirac leva l’état d’urgence. La pression et la présence policières se desserrèrent. On promettait de ravaler des façades, d’inaugurer des lignes de tramway, on faisait des discours sur le vivre ensemble. Mais, au fond, l’urgence sociale n’a fait que croître dans les quartiers, tandis que le mépris pour les populations a pris désormais le visage d’un Macron, d’un Retailleau, d’un Darmanin, d’un Bardella. Quant à la police, bien évidemment elle n’a pas changé, et la montée de l’influence de l’extrême droite dans ses rangs ne laisse pas espérer moins de morgue et de brutalité de sa part.

Les émeutes de 2023 ont été comme une répétition de celles de 2005, et ces deux flambées de colère ont aussi démontré la nécessité et l’urgence d’une véritable révolution sociale.

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