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- Lutte ouvrière n°2950
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Dans les entreprises
Nos lecteurs écrivent : Conditions d’exploitation et salaires de misère
J’ai travaillé 15 ans chez Lidl en banlieue parisienne. En 15 ans, j’ai eu 200 euros d’augmentation. À la retraite depuis un an, j’ai 908 euros de pension, passée à 944 euros au 1er février, plus une complémentaire.
J’ai eu deux accidents au travail. Notamment, une fois, je me suis pris le pied dans un fil qui dépassait d’une palette, qui aurait dû être filmée. Je suis, depuis un mois, reconnue handicapée à 10 %.
Dans le magasin où j’ai travaillé, nous étions 50 salariés inscrits sur le planning mais, entre ceux qui allaient dépanner ailleurs et qui ne revenaient pas et les arrêts de longue maladie, on était en réalité 20. Sur ces 20, entre les deux jours de congé hebdomadaire, les congés payés, les arrêts maladie ponctuels, en réalité le magasin tournait avec cinq à six personnes.
Les EP, équipiers polyvalents, ouvrent le matin, à 6 heures. Chaque matin arrivent de l’entrepôt sept palettes de frais, douze de fruits et légumes, entre dix et quinze de détails, trois de surgelés, trois de volailles ainsi que les complètes, c’est-à-dire les packs d’eau, jus de fruit, lait… À 8 h 30, tout doit être fini, affichage, rayonnage et nettoyage compris, à cinq ! Les lundis et jeudis, en plus des palettes quotidiennes, il y a des actions commerciales qui représentent dix palettes supplémentaires.
Lors des formations, on nous dit qu’il faut apprendre à penser « priorités ». Quand on nous donne trois ordres en même temps, comment les prioriser ? Dans tous les cas, on se fait engueuler. Entre nous, on pensait qu’il fallait que l’on soit au moins dix. Il n’ y a que quand un grand chef passe que l’effectif grossit, pour la vitrine. Au vestiaire, une injonction nous agaçait, quotidiennement on lisait sur le miroir, une fois notre tenue enfilée : « Vous êtes bien habillés ? Maintenant souriez et sortez ! » Ben voyons !
Lidl passe pour bien payer ses salariés parce qu’on commence à 1 600 euros au lieu du smic. En nous rendant polyvalent, le patron économise deux salaires par salarié !
Voilà comment les actionnaires de Lidl qui pleurnichent en ce moment font des chiffres d’affaires et des bénéfices faramineux. Vendredi 7 février, j’étais très contente d’avoir des nouvelles de mes anciens collègues. Ils se sont mis en grève. Le magasin a fermé. C’est la fierté.