Mépris et cynisme colonial18/12/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/12/P4-1_Mayotte_ok_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C50%2C450%2C304_crop_detail.jpg

Leur société

Mépris et cynisme colonial

Dépêché en urgence à Mayotte, avant que Macron ne décrète un deuil national et ne fasse lui-même le déplacement, le ministre démissionnaire de l’Intérieur, Retailleau, ne s’est pas contenté d’affirmer que l’État va « mettre le paquet et mobiliser tous les moyens possibles ». Il a immédiatement dénoncé « la question migratoire ».

Illustration - Mépris et cynisme colonial

Et pour bien démontrer que sa préoccupation n’est pas de répondre aux besoins des sinistrés, il a instauré un couvre-feu, mardi 17 décembre.

Déployer sans délai les moyens logistiques et sanitaires, militaires ou civils, dont dispose une puissance industrielle comme la France pour déblayer, soigner, héberger les sinistrés, puis reconstruire en dur les logements et les infrastructures d’un département de 400 000 habitants, ne devrait pas être compliqué. Mais tout indique qu’une fois l’émotion retombée, l’État français continuera, après comme avant le cyclone Chido, à traiter avec le plus grand mépris les habitants de Mayotte.

La France occupe Mayotte depuis 181 ans et a colonisé les Comores jusqu’en 1975. Pendant toute cette période, la puissance coloniale s’est bien gardée de développer l’archipel. L’État français a d’abord manœuvré pour que les Mahorais refusent l’indépendance afin de conserver une base stratégique dans l’océan Indien, puis en 2007 il a fini par élever Mayotte au rang de 101e département. Mais, depuis cette date, il n’a ni construit les logements nécessaires ni développé les infrastructures indispensables, à commencer par les écoles ou les hôpitaux.

Au contraire, plutôt que d’améliorer la situation des plus pauvres, les gouvernements successifs ont choisi de s’en prendre aux immigrés comoriens ou africains en les désignant comme les responsables de tous les maux. Ils ont traqué, raflé, expulsé les sans-papiers et lancé les opérations Wuambushu puis Place nette, détruisant les bidonvilles sans reloger leurs habitants. Aujourd’hui, Retailleau persiste et signe. Avant même qu’un seul conteneur de matériel soit arrivé, il affirme : « On ne pourra pas reconstruire Mayotte sans traiter, avec la plus grande détermination, la question migratoire ».

Pendant que la population compte ses morts et s’entraide sans demander les cartes d’identité, Retailleau compte les immigrés et se prépare à durcir encore les conditions d’obtention d’un titre de séjour. Tel un charognard, il se sert de la tragédie en cours pour faire de la surenchère sur l’extrême droite en se moquant bien en fait du sort des habitants de Mayotte.

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