Ukraine : escalade militaire et “diplomatie”20/11/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/11/une_2938-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Ukraine : escalade militaire et “diplomatie”

La décision d’un président américain sur le départ d’autoriser l’Ukraine à tirer contre la Russie des missiles portant jusqu’à 300 kilomètres est un nouveau degré franchi par l’impérialisme et son allié local dans l’escalade guerrière dans l’est de l’Europe. Ce à quoi Poutine a répliqué en faisant bombarder comme jamais les grandes villes d’Ukraine.

Les dirigeants de France et de Grande-Bretagne se sont empressés de saluer la décision américaine, qui n’a pas tardé à se concrétiser : dans la nuit du 18 novembre, des habitants de la ville russe de Briansk ont vu le ciel s’embraser entre les tirs de la défense anti- aérienne et les engins qui fondaient sur eux. Les quelques centaines d’experts militaires supplémentaires que les États-Unis venaient d’envoyer en Ukraine pour aider celle-ci à se servir d’armements sophistiqués ont, semble-t-il, rempli leur mission. En haut lieu, on répète que l’OTAN n’envoie pas de troupes combattre en Ukraine… mais on n’est pas obligé de le croire.

Des commentateurs ont voulu voir dans le feu vert de Biden un pied-de-nez à Trump, lui qui, avant même son entrée en fonction, se fait fort de mettre un terme à cette guerre « en un jour ». Si Trump est célèbre pour ses rodomontades, qui ne l’ont d’ailleurs jamais engagé à rien, l’attitude affichée par le président sortant et celle affectée par le « président élu » ne s’opposent pas forcément autant que certains le prétendent.

Les autorités américaines ont bien sûr soutenu militairement et financièrement l’Ukraine dans cette guerre, ne serait-ce que parce qu’elle leur était un pion bien utile dans un bras-de-fer avec la Russie qui dure depuis trois décennies qu’elle a pris en quelque sorte la succession de l’URSS. Cependant, Washington a toujours tenu à montrer qu’il dictait le scénario et le tempo de l’affrontement. On l’a vu à maintes reprises quand, malgré les demandes pressantes de Zelensky, la Maison-Blanche lui refusait tel type d’avion ou le droit d’utiliser certains armements au-delà du cadre approuvé par les stratèges du Pentagone.

Parallèlement, comme l’hebdomadaire allemand Die Zeit le détaillait sur son site dans un article du 5 novembre, les contacts diplomatiques et négociations entre la Russie et l’Ukraine n’ont jamais cessé. Et depuis bientôt trois ans que dure cette guerre, des réunions régulières se tiennent entre elles en présence de représentants des pays du G7, dont les États-Unis, et de la Chine. Outre avoir déjà donné des accords russo-ukrainiens de non-agression dans les domaines des exportations de céréales et de l’énergie, ces discussions ont envisagé les conditions et concessions, politiques et territoriales, que chacune des parties pourrait consentir dans le cadre d’un cessez- le-feu, sinon d’un accord de paix.

Les petites phrases de tel ou tel responsable américain « conseillant » à Zelensky de s’engager dans cette voie, en public car en coulisses c’est déjà le cas, s’inscrivent dans cette perspective. Tout comme les propos tenus par Zelensky mi-novembre, qui a répété miser « sur la diplomatie » pour aller vers la paix. Et cela ne tient pas au seul fait que d’ici quelques semaines Trump aura pris ses fonctions et pourrait fermer le robinet des fournitures d’armes et de subventions à Kiev.

Pour autant, bien fou serait celui qui prétendrait savoir à quel rythme et dans quelle direction la situation peut évoluer sur place. Même si Moscou et Kiev décident, chacun avec ses raisons, d’aller vers des négociations de cessez-le-feu, non seulement cela ne signifie pas une diminution des combats à brève échéance, mais cela peut vouloir dire leur intensification. Chaque camp veut arriver en position de force à la table de négociation : Kiev en portant ses frappes loin à l’intérieur de la Russie ; Moscou en résorbant au plus vite, grâce à 12 000 soldats nord-coréens, la poche de Koursk tenue sur son territoire par l’armée de Kiev, tout en grignotant le maximum de terrain dans le sud et l’est de l’Ukraine.

À cela s’ajoute le fait que chaque camp, même s’il sait qu’il devra rabattre de ses prétentions lors des négociations, tient à pouvoir poser en vainqueur, vis-à-vis de sa propre opinion mais aussi pour éviter que des oppositions au sein du régime veuillent en profiter.

Alors, que ces pourparlers se développent ou pas, la guerre en Ukraine va continuer. Et des milliers et des milliers de victimes militaires et civiles vont encore tomber pendant que les dirigeants politiques des grandes puissances, leurs diplomates et leurs généraux décideront, entre eux, du sort des peuples de la région.

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