Charente-Maritime et Vendée : Après Xynthia, le sort des sinistrés14/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2176.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Charente-Maritime et Vendée : Après Xynthia, le sort des sinistrés

Six semaines après le raz-de-marée du 28 février, alors que des maires des zones sinistrées s'insurgent contre le fait que pas un euro de l'aide pourtant modeste promise par l'État n'est encore arrivé, les victimes de l'inondation se sentent menacées par les annonces du gouvernement.

Luc Chatel a déclaré que 1 400 maisons situées dans des « zones noires », où le risque d'inondation est important, seraient rasées. On promet tout au plus aux habitants le rachat de leur maison au prix du marché avant la tempête Xynthia, grâce à une indemnisation venant des assureurs et du Fonds de prévention des risques naturels majeurs.

On comprend la méfiance et la colère des habitants des zones concernées. D'un côté, le maire de Port-des-Barques (estuaire de la Charente) dénonce le fait que, par souci d'économies, ce plan de rachat laisse à l'écart 85 % des habitants menacés de submersion sur sa commune. Parmi ceux-ci, des personnes âgées traumatisées par la tempête de 1999, puis par Xynthia, souhaiteraient pouvoir déménager en étant indemnisées de leur maison, dont le prix du marché est fortement dévalué depuis le raz-de-marée et ne leur permettrait pas de se reloger ailleurs. Elles devraient pouvoir bénéficier elles aussi d'une indemnisation. Par ailleurs, le Fonds de prévention, alimenté par les assurances, ne contient que le quart de la somme nécessaire aux indemnisations. Celles-ci risquent donc de se faire attendre.

À l'opposé, beaucoup d'habitants des « zones noires », voués à être expropriés, veulent au contraire rester et se constituent en associations, demandant qu'au lieu de démolir leurs maisons on rehausse et consolide, d'autant qu'ont été classées en « zone noires » des maisons qui n'ont même pas été inondées ! Et en effet, si certaines zones ont été construites récemment par des promoteurs avides, sans tenir aucun compte des risques d'inondation, d'autres zones inondées sont construites depuis plus d'un siècle, voire depuis le Moyen Âge.

Le gouvernement invoque le « retour à la nature » pour justifier les démolitions. Mais dans de nombreux cas c'est comme si l'on demandait le retour à la mer des polders de Hollande, dénoncent des habitants menacés d'évacuation. Et en effet la région du Marais poitevin, où se situent plusieurs des communes sinistrées comme Charron (Charente-Maritime) ou La Tranche-sur-Mer (Vendée), est une plaine alluvionnaire gagnée sur la mer par de grands travaux, du 7e au 13e siècle. Il s'agissait à la fois de construire des digues littorales pour empêcher les inondations lors des grandes marées, et de canaliser l'écoulement des fleuves côtiers vers la mer. Cela fut possible grâce à une organisation planifiée du travail, sous la houlette de moines bénédictins, pour la construction de digues, de canaux et de levées, puis pour leur entretien.

Paradoxalement l'État du 21e siècle, malgré tous les moyens techniques dont il dispose, les engins de terrassement ayant supplanté la main-d'oeuvre servile des moines et les GPS ayant remplacé les instruments de géométrie, en est à démanteler des services publics comme les DDE et n'est même pas capable de simplement entretenir les réalisations datant de l'époque féodale ! Et il ajoute à ces décisions arbitraires le mépris et l'arrogance vis-à-vis d'une population qu'il prie sans ambages de déguerpir.

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