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À Rio au Brésil : Les orages ravagent les favelas de Rio
Les 5 et 6 avril, à la suite des pluies torrentielles qui ont ravagé la région de Rio de Janeiro, on a compté rapidement plus de 220 morts. Et tous n'ont pas été recensés : il y aurait 200 victimes sous un pan de colline qui s'est effondré à Niteroi, de l'autre côté de la baie de Rio.
La ville de Rio elle-même a été bloquée plusieurs jours. L'inondation a arrêté autos et autobus au milieu des rues, coupé l'électricité, contraint les commerces à fermer. Des dizaines de milliers de personnes n'ont pu rentrer chez elles après le travail et ont campé dans des casernes ou des écoles. Beaucoup, réfugiés sur les autobus transformés en îles, ont été libérés par les pompiers. Le stade du Maracana était une gigantesque piscine.
Mais si la vie de tous les habitants de la ville a été affectée par ce cataclysme, ce sont les pauvres qui ont été tués, blessés, jetés à la rue, privés de leurs quelques biens. Il n'y a pas d'égalité devant les catastrophes naturelles, pas plus que devant la maladie ou l'insécurité.
Les zones ravagées par les eaux sont les favelas, ces bidonvilles qui abritent les habitants les plus pauvres. À Rio, elles occupent en particulier les collines abruptes du centre-ville. Les pluies violentes provoquent des glissements de terrain, entraînant les frêles bicoques construites à flanc de colline et écrasant les habitations établies au pied de celles-ci.
Certaines de ces collines servent de décharge d'ordures. Par exemple à Niteroi, où il y a eu la majorité des morts, l'ancienne décharge du Morro do Bumba, désaffectée il y a vingt-cinq ans, elle s'est couverte d'une favela, malgré l'insalubrité et l'instabilité du terrain. Quand tout un pan s'est écroulé, il a enseveli les habitants d'en haut aussi bien que ceux d'en bas. À deux kilomètres de là le Morro do Ceu, une décharge en activité haute de 200 mètres, menace de s'effondrer sur le quartier voisin.
Dans l'agglomération de Rio, qui compte 10 millions d'habitants, 3 000 habitations ont été détruites. Mais c'est 40 000 personnes qui devant le danger ont dû quitter leur logement, plus des trois quarts à Sao Gonçalo, une ville ouvrière de 900 000 habitants proche de Niteroi. Les villes et les quartiers ouvriers sont les premiers et les plus gravement touchés, et seront les derniers à être réparés, s'ils le sont un jour.
Face au désastre, les autorités se sont contentées de prier le ciel pour que la pluie cesse et d'accuser les victimes d'être seules responsables de leur malheur. « La seule chose qu'on peut faire, dans un moment comme ça, c'est de demander à Dieu que la pluie s'arrête un peu, pour que les choses s'améliorent et reviennent à la normale », a déclaré le président Lula de passage à Rio. Le maire de la ville a demandé aux gens de ne pas appeler les secours : « Nous ne pouvons rien faire. » Quant au gouverneur de l'État de Rio, il a eu le front de dénoncer ceux qui s'obstinent à habiter des zones à risques : « Ils sont irresponsables d'habiter là. Ces gens commettent pour ainsi dire un suicide. »
Mais est-ce la faute des pauvres s'ils ne peuvent habiter les immeubles luxueux des centres-villes ? Il y a à Rio un millier de favelas, avec 1,3 million d'habitants. En huit ans, les favelas de Niteroi ont doublé. Les bidonvilles occupent toutes les zones non constructibles, en particulier au bord des rivières, des égouts à ciel ouvert, sur les pentes et collines dangereuses, près des décharges et dessus. Les trafiquants s'affrontent entre eux ou avec la police pour contrôler les favelas escarpées de Rio.
L'insécurité, les mauvaises conditions de vie et d'habitation, la mort : pour les pauvres de Rio c'est tous les jours, et un peu plus en période d'inondations.